LA LOCO AU PRUD’HOMME. KAFKA AU QUOTIDIEN…

Comme je vous l’avais annoncé, j’ai écrit un livre racontant mon aventure à la
Loco.
Il fait donc 357 pages.
Ci dessous vous trouverez quelques nouveaux feuillets racontant avec humour (l’humour est la seule chose qu’ils n’ont pu me voler) un nouvel épisode de mon aventure au pays de Kafka, la France.
Après l’extrait de la perquisition à la Loco (https://www.temoignagefiscal.com/ma-perquisition/), nous allions faire connaissance du Prud’homme dans des circonstances assez cocasses.
Pour un dépucelage, il ne se passa pas très bien.
Avoir perdu ce conflit avec notre ex-employé prouve  que le monde de l’entreprise, en France, marche complètement sur la tête.
Nous aurions dû gagner haut la main, sans l’ombre d’une discussion mais contre toute attente et toute logique, nous allons le perdre.
Qui a dit que le crime ne paye pas ? L’entreprise, à priori, ne doit pas fonctionner suivant les mêmes règles de droit lorsqu’elle se retrouve devant les Prud’hommes.

Depuis l’ouverture de la Loco, durant les mois de juillet et août, nous ne programmons pas de concerts.
A cela deux raisons :
La clientèle de concert est essentiellement parisienne et elle part en vacances pendant cette période.
Durant ces deux mois, la majorité de nos clients sont des provinciaux ou des touristes étrangers qui viennent à la Loco uniquement pour s’amuser.
C’est-à-dire boire un coup et danser, pas pour se taper un concert.
La première année nous avions programmé des groupes mais devant le bide occasionné par leurs passages, nous avons vite arrêté.
Les clients désertaient la piste, allaient au bar ou dans les deux autres salles, attendaient que cela se passe pour revenir danser.
Donc, pas de concert pendant cette période estivale.
Comme je vous l’ai expliqué, pour pouvoir recevoir groupes français ou étrangers qui  tiennent la route, nous avions dû nous équiper de super lights et d’une sono top niveau.
Les groupes étrangers furent d’abord réticents et méfiants les premiers temps mais très vite cette méfiance disparue au vu des performances de nos équipements.
Pour le son, car l’anecdote que je vais vous raconter se rapporte à celui-ci, notre console qui le gérait, était pilotée par un de nos sonorisateurs en titre et sa petite équipe. Elle  nous avait coûté un bras. Plus de 150 000€. Il est vrai qu’elle possédait des voyants, des curseurs, des cadrans et tout cela clignotaient dans tous les sens : un Boeing dernière génération. On en avait pour son argent. Même au poids.
Tous les ans, début septembre, avant le retour des concerts,  en vrais pros et par acquit de conscience, même si apparemment elle n’en avait pas besoin, nous la faisons réviser. Bien sûr cela avait un coût, mais la tranquillité aussi. Avoir une panne en plein concert n’était pas du meilleur effet…
Tout au long de l’année, entre deux concerts, cette super console était « stockée » dans la grande salle, dans un recoin sous l’escalier. Elle était elle-même protégée en étant enfermée dans une solide caisse en bois noire sur roulettes fermée par gros cadenas.
Un concert ? Hop, on faisait rouler la grosse caisse noire au milieu de la salle et on enlevait les parties supérieures et frontales  de celle-ci pour faire apparaître la console. Prête à l’emploi.
Fin du concert ? Re-hop, manipulation inverse et paf dans sa boite puis dans son coin, sous l’escalier, jusqu’à sa prochaine sortie. Facile, rapide et sûr.
Dans ce long préambule, tous les détails ont leurs importances.
Comme dans un conte, les années passèrent (neuf ans) et par un bel après-midi d’été, mi-août 1995, passant dans la grande salle, peut-être une prémonition suggérée par Hermès le dieu des voleurs, je m’approchais de la caisse et l’ouvris.
Stupeur, je n’en croyais pas mes yeux, elle était pleine de vide.
La console avait disparue, elle s’était volatilisée, évaporée ! On nous l’avait volée à notre barbe. Il fallait être sacrément balaise et gonflé pour nous l’embarquer sans que personne ne remarque rien. C’était quand même un sacré morceau. Environ 2,50m de long sur 1,50 grosso modo. En plus ça devait peser un âne mort.
Je me précipite au bureau et raconte ma découverte. Tout le monde reste scotché la bouche ouverte.
Avant d’appeler les flics, par acquit de conscience, je fais quand même venir notre régisseur.
Lorsque je lui fais part de la disparition de la console, je sens de sa part comme un léger voile de gêne, mais bon, lui aussi, il ne comprend pas et il me met une couche de bonne foi…
Il devient très mal à l’aise lorsque je parle de plainte à la police. Là, il  crache le morceau.
Comme la pauvre console pendant deux mois était au repos, qu’elle devait s’ennuyer toute seule dans sa boite,  et qu’elle ne servait à rien ni à personne, notre ami Martinez, notre sonorisateur, faisait une bonne action pour pas qu’elle « rouille ». Il la louait pour son propre compte, of course, certainement au black, en province pour des tournées.
Fin août, elle revenait de ses pérégrinations extérieures, reprenait discrètement sa place dans le coffre, comme par enchantement et ni vu ni connu. Et elle était, bien sûr, révisée à nos frais. Elle devait en avoir bigrement besoin, car les tournées ça use un max le matos.
Tous nos techniciens étaient au courant de la combine mais motus et bouche cousue, rien n’avait transpiré depuis des années.
Notre sonorisateur était un auto-entrepreneur avant la lettre !
Il avait monté sa petite entreprise estivale sur notre dos et elle tournait rond, sans à coup et sans facture. Que du bonheur.
Évidemment, en entendant les explications de notre loyal régisseur, j’explose.
Putain, elle est belle l’histoire. Ce mec nous carotte sans anesthésie depuis des années, toute la technique le sait et rien ne nous remonte. Rien ne transpire.
Sympa la confiance.
Et ce Martinez, que nous côtoyions à longueur d’année, qui nous regarde droit dans les yeux et qui nous tond chaque année à la belle saison. Il se faisait lui-même une belle prime d’été.
Bref, comme lui-même était en vacances, il devait certainement se louer avec « sa » console. Personne ne sait où le joindre (les portables n’existaient pas encore), mais le régisseur va essayer de le joindre, dit-il.
Je suis persuadé que tous les techniciens savent où il est, mais bon je me calme.
Deux heures plus tard, le régisseur me dit l’avoir eu au téléphone et que bon,  Martinez nous renvoit, par transporteur, notre console.
Elle arrivera deux jours plus tard.
Evidemment, aussi sec sans réfléchir, nous virons ce petit coquin.
Nous aurions du réfléchir mais l’ « affaire » était tellement limpide.
Que croyez-vous qu’il nous arriva ?
Martinez nous attaqua au Prud’homme pour licenciement abusif.
Abusif, il n’est pas beau le motif ?
Passons directement environ deux ans et le résultat fut, pour nous,  un jugement défavorable. Et des belles indemnités à lui verser. En plus du black qu’il s’était fait pendant des années sur notre dos !
En résumé : nous ne pouvions rien  lui reprocher car aucune note de service interne (affichée) n’interdisait à un de nos employés « d’emprunter » notre matériel.
En deux mots, on l’avait profond pour l’avoir licencié sans motif réel, dixit le tribunal. Se faire voler par un employé n’est donc pas un motif réel.
A la suite de ce jugement, j’ai dû intégrer cette nouvelle notion de « motif réel » de notre fameux et adipeux code du travail, que le monde entier doit nous envier, je présume.

 

1 étoile2 étoiles3 étoiles4 étoiles5 étoiles 5,00 sur 5 (3 avis)
Loading...

4 réflexions sur « LA LOCO AU PRUD’HOMME. KAFKA AU QUOTIDIEN… »

  1. le citoyen ne compte pas : Tout dans l’État, rien contre l’État, rien en dehors de l’État, Benito Mussolini, définition du fascisme

  2. Gérant d’une entreprise de BTP un de mes employés (en CDD depuis 3 semaines dans l’entreprise) quitte le dépôt avec un camion chargé de gravier, la prise de benne étant restée embrayée par sa faute (aucune vérification de sa part n’avait été faite avant le départ), lors de la traversée d’un village celui-ci benna le camion et tartina 10 cm d’épaisseur de gravier sur 500 ml environ sur toute la largeur de la route, la benne levée arrachait aussi 2 gros câbles électriques qui atterrirent sur la route complètement dénudés.
    En bon employé modèle et consciencieux, celui-ci baissa la benne et continua sa route comme si rien ne c’était passé et sans prévenir quiconque, j’ai été prévenu par un client habitant le village.
    Le soir même je virai cet abruti dangereux.
    Attaqué aussitôt pour licenciement abusif sans entretien préalable je fus condamné à lui verser 1 an de salaire par les prudhommes. D’après ces c…… j’aurai dû le prévenir 1 mois avant pour le convoquer à un entretien préalable de licenciement puis respecter le délai légal après cet entretien. Là aussi celui-ci à bénéficié des précieux conseils de la CGT.
    Pour résumer
    Cela lui laissait le temps de tuer quelques dizaines de personnes sur la route, mais là j’aurai été responsable de ne pas avoir pris des mesures nécessaires pour stopper ce fou.
    Moralité: De toute façon au prudhomme et ailleurs le coupable c’est le PATRON

  3. Pour vous faire rire un peu aussi, j avais une entreprise dans le bâtiment , et j ai “viré” un employé qui arrivait chez les clients ivre et qui fumait des joints devant eux, toute la journée … si bien qu un soir, il s’est explosé avec le camion de l entreprise 100m après être parti de chez le client… Il a été retrouvé et arrêté par la police , endormi et encastré dans un poteau avec le camion…
    Une très belle publicité pour l entreprise …
    Suite à ces évènements que j ignorais, je l ai mis à pieds, puis remercié.

    Ce charmant bonhomme a lui aussi décidé de me trainer devant le tribunal des prud hommes … et j ‘ai …. perdu !!!

    Après m être fait traité d’irresponsable par les 3 rigolos du tribunal : et oui, je laissais un employé boire et fumer chez des clients !! j ai été condamné à lui payer des indemnités , et son contrat a été revu à la hausse sur les 2 dernières années …(merci la CGT qui l’a aidé )

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *