Je me permets de partager avec vous ce petit moment d’amertume qui s’installe lorsque l’on a raison trop tard.
Dans la vie, comme dans les cocktails, l’amertume doit être maniée avec précaution, mais elle est indispensable pour relever le gout de l’ensemble.
Dans un billet publié il y a quelques mois, j’avais mis un lien qui ouvrait une vidéo tournée en Afghanistan au côté d’un détachement américain en opération avancée. Un des jeunes soldats — Il s’agissait de militaires professionnels et volontaires — répondait à la question : « pourquoi avoir voulu être là ? » froidement par « Pour tuer ».
Quels que soient les motifs qui ont poussé Poutine à déclarer la guerre, le résultat — sauf à voir les Ukrainiens fuir comme les Français en 1939 et trouver un Pétain pour signer une paix immédiate repoussant ainsi à demain le carnage — ne pouvait que finir en boucherie. Il est des hommes qui aiment tuer. Le soldat est de ceux-là. Le soldat chevaleresque ne fait pas de vieux os. N’oublions pas qu’il met sa propre vie dans la balance de sa recherche de satisfactions mortelles. Ce n’est pas un monstre, c’est un homme. Bien d’autres ne sont pas plus délicats, malfrats, trafiquants ou corrupteurs en tous genres. Sans compter les bienpensants qui tuent gaiement au service de leur foi. Que vaut la vie des autres, d’un inconnu ?
Aujourd’hui en Ukraine, en admettant même que quelques excès puissent se glisser dans les constats actuels et futurs du carnage d’une armée d’invasion contre une population, la cause est entendue, le massacre est consommé. Poutine ne peut pas s’en remettre. Il le sait sans quoi, comme Staline ou Mao, il irait jusqu’au bout, jusqu’à l’éradication des Ukrainiens et à la guerre mondiale totale.
Tout à ses calculs de pouvoir et de puissance, il a complètement sous-estimé la réalité humaine, celle de ses soldats, de son armée identique à toutes les autres. Il aurait dû le savoir : on ne déclenche jamais la guerre, elle tue aveuglément, elle est hideuse.
En ce qui nous concerne, avoir compris cela avant qu’en soit fait le constat ne peut amener aucune satisfaction tant les dégâts sont lourds. Et pourtant il s’agit… des autres… pas de nos personnes.
Alors quand une autre guerre produit sur nous personnellement les mêmes conséquences et que tout le monde est sur le point d’en prendre conscience, l’amertume d’avoir eu raison seul, d’avoir lutter pour le faire admettre, d’avoir souffert en vain pendant si longtemps, envahit un peu la pensée, décourage, façonne l’indifférence personnelle : dommage.
Je veux parler de ces armes aussi terribles que les bombardements, que l’occident oppose à Poutine : la saisie des biens, la dépossession forcée, le blocage des transactions économiques, l’isolement financier.
Ces armes que Bercy manie contre la France, contre les Français, tous les jours que le Bon Dieu donne.
Tous les jours, à partir d’une fiscalité excessive, Bercy saisit, accuse de fraude fiscale, contraint, ruine, vend les biens de centaines de milliers de Français.
Jusqu’à aujourd’hui il fallait admettre cette situation, la considérer comme naturelle.
Depuis vingt ans j’en dénonce le caractère arbitraire, destructeur. Je l’ai comparée aux lettres de cachet. J’ai fait connaître ses ravages. Mais Bercy prétendait qu’il s’agissait de la rançon à payer pour vivre dans un beau pays où tout est à la portée de tous.
Or, soudain, COVID démontre que rien n’est accessible sauf aux privilégiés, que tout est en vrac, qu’une bureaucratie obèse orchestrée par une technocratie prétentieuse vit au dépend du pays et contamine tout ce qu’elle touche, que ceux qui tentent de ne dépendre de personne sont massacrés, volés, dépossédés. On leur applique les lois de la guerre économique, on les écrase du poids du vol de leur biens, on leur explique que c’est pour le bien des autres.
Mais non, ce n’est pas la vérité. Les hommes de Bercy sont des soldats, mais les soldats du pillage, ils aiment ça, ils ne vivent que pour ça. Notre misère est leur récompense. La pauvreté qu’ils provoquent iniquement les fait jouir. Ce sont les snipers du pillage.
Aujourd’hui ils œuvrent à découvert. Ils sortent de leurs caches, les cibles sont, peut-être à juste titre, les otages exécutés face à la guerre déclenchée par Poutine.
Mais, les soldats du fisc exposés soudain, leur violence, leur puissance, leur vice, leurs dégâts, leurs méthodes, leur absence de limite, leur jouissance, sautent aux yeux de l’humanité.
Avoir su tout cela avant tout le monde n’apporte aucune satisfaction.
Le prix à payer a été trop élevé. Une seule chose pourrait consoler, c’est le fameux : « plus jamais ça. »
Oui mais, justement, tout se révèle par la guerre dont pourtant il était aussi dit : « plus jamais ça ».
Et puis, ce constat fait, les choses vont-elles changer ? Permettez-moi d’en douter.
Alors oui, ce soir mon cocktail est un peu trop amer, demain peut-être sera-t-il mieux réussi. J’espère que ces essais ne vont pas faire de moi un alcoolique …
Bien à vous. H. Dumas
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Un coup de mou, M. DUMAS ?
Allons donc ! puisque l’heure n’est pas à l’optimisme, misons donc sur l’espoir.
‘L’espoir n’est définitivement pas la même chose que l’optimisme.
Ce n’est pas la conviction que les choses vont bien tourner, mais la certitude que les choses ont un sens , quelle que soit la manière dont elles tournent.’
Vaclav HAVEL