Dans l’absolu, le pouvoir pourrait être éclairé, associatif, c’est à dire attentif à ses obligés, aux libertés individuelles, et surtout discret, minimum.
Hélas, dans la réalité, le plus souvent une fatale alchimie le lie à l’idée de contrainte, générant des réactions en chaîne pour aboutir à la violence, à la guerre, à la dictature et à tous ces excès qui répandent aveuglément la mort.
La confusion des émotions se passe alors de la façon suivante :
L’idée de contrainte
Depuis toujours elle est associée au pouvoir. Celui-ci, sous sa forme la plus absolue : Dieu, ne se vit que par les contraintes qu’il impose.
Un Dieu qui vous foutrait la paix et se contenterait de partager la joie de vivre avec ses ouailles ne serait pas crédible. Il serait plus proche de Satan que de Dieu.
L’homme ne respecte un Dieu qui si celui-ci le contraint, plus il le fait lourdement plus le respect est intense.
L’exercice du pouvoir
Sa visibilité principale s’exprime à l’occasion de l’imposition des contraintes qui justifient son existence, qui font sa réalité.
Son exercice présuppose le châtiment, la sanction sans laquelle il n’est pas perçu.
Cette confusion « pouvoir-contrainte » saute aux yeux pour ceux qui externes aux religions les observent à travers l’histoire ou l’actualité, tant ce type d’enchaînement entre pouvoir et contraintes y est caricatural.
Dans une organisation laïque, païenne, les choses ne sont pas différentes. Dieu et ses représentants sont remplacés par un président et l’organisation qui le porte. Celui-ci et sa clique ne paraitront présents qu’à l’aune des contraintes qu’ils imposent.
Où les choses se corsent
La démocratie dans laquelle nous vivons tend à émietter les pouvoirs pour justement atténuer leurs contraintes. Se faisant, elle multiplie à l’infini les enchaînements de ces pouvoirs et de leurs contraintes, au point que chaque groupuscule croit devoir imposer aux autres ses propres contraintes qui seront la marque de son pouvoir.
C’est cela qui génère la diarrhée législative et réglementaire qui nous noie.
Les frustrations
Que ce soit pour ceux qui exercent le pouvoir ou pour ceux qui y adhèrent, son atomisation démocratique est une source constante de frustration.
Cela tient au fait d’avoir à subir des contraintes issues de principes de pouvoirs que l’on ne partage pas, ou, au contraire, d’être limité dans les contraintes que l’on souhaiterait imposer au nom du pouvoir auquel on adhère.
Ces frustrations sont éventuellement supportables si elles sont strictement limitées à la sphère intellectuelle de l’organisation politique
Mais il en est tout autrement lorsqu’elles génèrent des conséquences matérielles lourdes.
C’est le cas pour les religions se voulant pouvoir politique, c’est aussi le cas du pouvoir politique se voulant pouvoir économique.
La confusion est alors totale.
Une escalade constante entre les différents concepts de pouvoir du fait de leur foultitude finit par imposer l’idée que seule une contrainte d’intensité supérieure pourrait imposer un pouvoir total salvateur, chacun pensant qu’il en sera le bénéficiaire.
La place est alors prête pour l’avènement d’une bande de profiteurs qui, utilisant la violence d’Etat, satisferont le souhait incontrôlable et majoritaire dans la population d’un pouvoir fort, dont le seul fait d’imposer des contraintes lourdes pourra donner l’illusion d’une réalité.
C’est ainsi que naissent toutes les dictatures.
Il serait vain de croire, au motif que l’on a déjà vu ça, que la survenance d’une dictature n’est pas si grave, que notre pays serait parfaitement capable d’y faire face.
Ce n’est pas le cas.
Ce sont toujours les hasards de l’histoire qui nous ont sorti de ce type d’enchaînement qui nous avait entraîné au fond du gouffre.
Il se pourrait bien, à jouer avec la folie de la multiplication des pouvoirs et de leurs inévitables contraintes, que nous franchissions une nouvelle fois la ligne jaune de la dictature pour y rester très longtemps, notre insignifiance mondiale actuelle n’amenant personne à se déplacer pour nous remettre dans le droit chemin du pouvoir politique maîtrisé, de la liberté individuelle, de la tolérance, de l’économie libérale et de la concurrence sans ingérence de l’Etat.
L’année 2015 fait suite à un tel cortège de frustrations du couple fatal « pouvoir-contrainte » qu’elle est l’année de tous les dangers.
Bonne année quand même et bien cordialement. H. Dumas.