MAGISTRAT : L’IMPOSSIBLE MÉTIER

 

Ce blog a deux  ans et parcouru beaucoup de chemin. Je l’ai créé acculé, au bord de la misère, de la disparition matérielle et peut-être physique, lâchement mis à mort pour rien, sans motif, gratuitement, par des fous, des « stasistes » couverts par le système et portés par une pensée populiste.

Initialement, je me suis employé à essayer de mettre sur le papier mes propres problèmes à seule fin de les comprendre. Ce faisant, en effet ils se sont éclaircis, me sont parus sinon surmontables du moins valant une lutte. Puis, la dimension sociologique, politique, m’a happé. Mon regard et ma pensé ont évolué, ils sont devenus plus généraux. Aujourd’hui, même si je crois utile de continuer à évoquer mes propres problèmes qui restent un fil conducteur, c’est bien la dimension globale et humaine de la fiscalité et de son support  « l’économie » qui m’intéressent.

Je profite de ce début d’année pour vous dire combien je vous dois à vous lecteurs.

Que vous soyez un fidèle abonné, un lecteur occasionnel convaincu, un opposant  farouche, que vous ayez partagé mes observations et certaines de mes conclusions ou qu’au contraire la haine vous étouffe en lisant ma prose et que vous ne cessiez de cracher sur mon ouvrage, vous m’êtes tous indispensables, c’est vous qui donnez vie à ce blog.

Je vous en suis infiniment reconnaissant et je vous présente tous mes vœux les meilleurs pour cette nouvelle année. Nous allons, cette année 2012, essayer de dépasser le simple constat pour nous engager vers des propositions. Nous verrons, ensuite, s’il nous est possible de nous structurer pour les faire, sinon aboutir, au moins entendre par le plus grand nombre.  Ceci posé, le billet d’aujourd’hui.

MAGISTRAT : L’IMPOSSIBLE METIER

Les deux piliers de la société, desquels découle tout le reste, sont l’éducation et la justice. Mes enfants sont grands, je n’ai pas la charge de mes petits enfants, je n’ai donc plus d’information crédible concernant l’éducation donnée par l’Etat. Certains en pensent pis que pendre, d’autres au contraire en sont satisfaits, je ne me permettrai pas de prendre position sur le sujet.

Par contre, la justice, je connais. Ca ne marche pas. Je peux vous expliquer pourquoi. Je la  fréquente tous les jours, grâce notamment à nos amis du fisc. J’ai donc largement eu le temps d’en observer le fonctionnement. J’ajouterai que ma position de « contrôlé fiscal » donc de coupable officiel, de bouc émissaire, m’a placé en observateur privilégié de ces disfonctionnements.

Les magistrats

Issus d’une sélection drastique, ils sont au minimum intelligents. Sont-ils libres? Certainement pour une grande partie d’entre eux. Ceux qui, le stylo entre les dents, rêvent de transformer l’organisation sociale sont une minorité. Les serviles du pouvoir sont sans doute plus nombreux, mais ne sont pas majoritaires.  Globalement, les magistrats sont conscients de leurs responsabilités et ne sont pas prêts à la brader. Alors, d’où vient le fait que leurs jugements sont rarement clairs et si souvent choquants? Comment se fait-il qu’ils jugent, la plupart du temps, de façon prévisible et si éloignée des réalités? Neuf fois sur dix, ils paraissent ne pas avoir pris en compte les spécificités des dossiers qu’ils jugent. J’y vois deux raisons majeures.

La première: les enquêtes.

Le magistrat juge, il le fait à partir des éléments qui sont en sa possession. Ces éléments sont issus de l’enquête. Dans notre pays, les enquêtes sont diligentées par des représentants assermentés de l’Etat, gendarmes, policiers, agents du fisc etc.… Il faut avoir eu à faire à l’un d’eux pour comprendre la misère intellectuelle qui les écrase. Je suis sûr que chacun de vous a un jour été interrogé par un gendarme, un policier, tapant à deux doigts un PV dont la relecture laisse pantois. Je ne parle pas des notifications fiscales… c’est pire que tout. Je ne parle pas non plus des experts en tout genre, dont les « expertises » sont aussi hermétiques que la cabale… Sur tous ces points, la situation ne s’améliore pas, elle se dégrade.

Tous ces documents improbables sont l’enquête, le matériau dont les juges vont disposer pour juger. Nous sommes évidemment très loin des enquêtes et contre-enquêtes de la justice américaine. Chez nous, pas de DSK « embastillé » sur dénonciation et relâché après trois mois d’enquête.  Chez nous l’enquête, en règle générale, « piétine ». Une manière imagée de dire que les résultats sont rarement à la hauteur du problème. Que peut faire l’intelligence affutée et sélectionnée de nos juges face à un matériau si imprécis, si ordinaire, quand il  n’est pas carrément falsifié? Ingénieurs et architectes ont le même type de problème, qui produisent  des plans sophistiqués mis en œuvre sur les chantiers par une main d’œuvre la plupart du temps illettrée. Dans le bâtiment cela se traduit par des sinistres à répétition, il en est de même dans les tribunaux.

La deuxième: la jurisprudence.

En plus de naviguer à vue, du fait de documents d’enquête indigents, les magistrats sont tenus par la jurisprudence. Alors que chaque procédure est particulière, que chaque cas devrait faire l’objet d’un jugement particulier, que cette  unicité est la grandeur même de la justice et donc des magistrats, ceux-ci ont l’obligation de ne pas s’écarter de la jurisprudence. Celle-ci inclut tous les jugements rendus en dernier  ressort, notamment par La Cour de Cassation, sur des sujets plus ou moins comparables à celui en cours de jugement. Il s’agit pour les magistrats d’une véritable castration de leur rôle, d’une défiance absolue, d’une perte irréparable de liberté. La liberté de juger devrait être leur raison de vivre, notre raison de les respecter, quitte à voir des jugements totalement  opposés sur des problèmes identiques. Mais non, notre vieux pays centralisateur préfère une justice castrée, mais soumise, à une justice libre, mais imprévisible.

En clair, une justice dont nous serions fiers, ce n’est pas pour demain. Dans ces conditions, magistrat est bien un métier impossible. C’est pourquoi, je me méfie des vieux briscards et je compatis pour les jeunes qui choisissent ce métier. Je les croise  si souvent et suis si souvent déçu.

Cordialement. H. Dumas

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A propos Henri Dumas

Je suis né le 2 Août 1944. Autant dire que je ne suis pas un gamin, je ne suis porteur d'aucun conseil, d'aucune directive, votre vie vous appartient je ne me risquerai pas à en franchir le seuil. Par contre, à ceux qui pensent que l'expérience des ainés, donc leur vision de la vie et de son déroulement, peut être un apport, je garantis que ce qu'ils peuvent lire de ma plume est sincère, désintéressé, et porté par une expérience multiple à tous les niveaux de notre société. Amicalement à vous. H. Dumas

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