Les juges ont enfin craqué !
L’ancien commissaire européen Thierry Breton se répand sur toutes les chaînes d’information on ne sait pourquoi. Il doit chercher une nouveau job. Peu importe, car il vaudrait mieux qu’il s’explique sur ce fameux « marché intérieur » dont il était chargé. Le marché intérieur est le principal acquis de la construction européenne. Voici comment les traités le définissent : « Le marché intérieur comporte un espace sans frontières intérieures dans lequel la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux est assurée selon les dispositions du présent traité. » Autrement dit, la concurrence est la règle dans toutes les activités en Europe. Et il est de fait que ce principe est plutôt bien appliqué. Sauf sur un point : la Sécurité sociale.
Le commissaire Breton devait impérativement faire appliquer le principe de concurrence à la Sécurité sociale française, qui le viole impunément. Malgré nos objurgations et nos visites à Bruxelles, il n’en a rien fait. La France est en train de s’effondrer par pans entiers en raison du coût sans cesse croissant de la protection sociale monopolistique et donc illégale. Dernière révélation en date, le budget des hôpitaux ne sera pas consacré pour l’essentiel à la santé mais aux retraites du personnel, dont le régime va accuser cette année un déficit de 3,8 milliards et s’achemine vers un trou de 11 milliards dans cinq ans.
Cela fait 25 ans que la France viole les traités européens. Quand vous en parlez à un fonctionnaire bruxellois, il pique du nez, sachant parfaitement qu’il ne remplit pas sa mission. Car c’est Bruxelles qui est responsable de l’application des dispositions européennes. La Commission ne le fait pas dans ce cas parce qu’un marché a été conclu avec la France à l’époque de José Manuel Barroso qui y voyait le moyen d’être reconduit à la tête de la Commission. Depuis, il est parti, mais le deal se poursuit : on ne touche pas à la Sécu française.
Ce feuilleton est digne des séries hollywoodiennes où l’on retrouve toujours les mêmes acteurs, fût-ce dans des rôles différents. Le principal collaborateur de Michel Barnier, Olivier Guersent, est toujours, et depuis longtemps, le directeur de la concurrence à la Commission. Il était donc de ce fait le principal collaborateur de Thierry Breton. Et ainsi de suite …A Bruxelles on vous dit que c’est à la France d’appliquer les règles. Comme si l’on n’en était pas chargé. Descendons un peu l’échelle des responsabilités. La directrice de cabinet de Clément Beaune, récent ministre chargé de l’Europe, était Garance Pineau, qui est aujourd’hui devenue la directrice générale du Medef. Bref, c’est tout le système français de gouvernement qui ne veut pas de la liberté sociale et qui maintient la France dans les fers du communisme.
Nous n’avons pas découvert ces réalités depuis peu. Nous connaissons tout ce beau monde et nous savons qu’ils ne s’arrêtent que quand on les arrête. Nous avions misé sur un craquement des juges français. Il s’est produit, Réunie en chambre mixte, la cour de cassation a inséré dans un arrêt qui, pour mieux dissimuler le revirement, n’a aucun rapport avec la protection sociale, un attendu qui met un terme aux élucubrations judiciaires françaises : « Le juge est tenu, lorsque les faits dont il est saisi le justifient, de faire application des règles d’ordre public issues du droit de l’Union européenne, même si le demandeur ne les a pas invoquées. ». Or les dispositions des traités sont bien d’ordre public. La messe est dite.
Tous ceux qui rêvent de quitter la Sécu (cinq cent mille indépendants l’ont déjà fait) peuvent à présent se libérer sans crainte. Et surtout les Français jeunes (dont 12 millions ont moins de 30 ans) vont pouvoir échapper à la retraite par répartition qui les condamne à financer des pensions dont ils ne bénéficieront jamais. C’est la plus grande révolution sociale qu’ait connue la France. Elle n’aurait jamais dû attendre aussi longtemps, mais le tout Etat s’est ligué contre l’intérêt des Français. Ce fut donc une guerre civile. Son vainqueur ne pouvait être que la société civile.
Les retraites ne sont pas seules concernées par cette révolution. L’ensemble du système social va être balayé par une immense vague de liberté. Ce système avait été construit pour protéger les travailleurs passés du stade d’agriculteurs à celui d’ouvriers d’usine. Il fut maintenu et surtout durci en 1945 par le parti communiste pour enfermer les travailleurs et par la suite les indépendants dans un carcan collectiviste. Sa réussite, à cet égard, fut totale, comme son échec économique et démocratique. Les guerres idéologiques sont un calvaire pour les sociétés qu’elles affectent. Elles pourrissent tout, le tissu social, comme le tissu politique, la vie des familles comme celle des villes et des villages. La France est blessée de toute part. Elle va devoir se soigner.
Cette extraordinaire affaire a d’abord intéressé les médias, puis ils sont passés à autre chose. Il n’empêche qu’ils ont failli dans leur mission. Ils vont évidemment se rattraper maintenant. Pour faire oublier leur défaillance. Mais les Français n’ont plus confiance dans l’information qu’on leur débite. Ce n’est certes pas nouveau, mais à ce point c’est rare. Grand chambardement en vue !
Claude Reichman
la progressivité/dégressivité n’est pas dans l’ADN des obtus qui nous gouvernent; sérieusement basculer d’un seul coup les cotisations sur le privé c’est provoquer une faillite-tsunami de la sécurité sociale. A marche forcée il s’en faut de 10 années au minimum pour passer d’un système à l’autre, juges ou pas.
M Reichman pouvez-vous donner l’arrêt de la CC et l’endroit de l’attendu ?
Pour les retraites c’est encore plus compliqué car « sauver « la répartition c’était camouflé le financement des retraites publiques dans un ensemble (la Sécu) pour rendre impossible la transparence et ainsi la tromperie de l’inexistence du financement.
Un nouvel espoir après bien d’autres.
Passionnant ce billet Claude.
Amicalement. H. Dumas