Bien sûr, n’importe qui comprend que Zemmour, Ciotti, Mélenchon ou Le Pen soient détestés de leurs adversaires.
On comprend bien aussi que ceux qui les adorent, détestent donc Macron, Pécresse ou Jadot.
Tout le monde comprend que Zemmour déteste Mélenchon, et inversement.
Mais on comprend mal la détestation des Pécresse/Bertrand pour Macron et aussi mal, la détestation de Le Pen pour Zemmour et celle de Mélenchon pour Hidalgo.
C’est que tout cela est très compliqué.
Se mêlent confusément – pour ce qu’il en reste – les oppositions idéologiques ( les plus nobles), les haines recuites (les plus viles), les jalousies (les plus mesquines), les ressentiments (les plus durables), et puis tout simplement les antipathies physiques (gouvernées paraît-il par la chimie) rendant incompatibles un corps avec un autre.
La démocratie a fait litière de l’espérance qu’elle portait. Elle est devenue pragmatique.
Le combat pour tous s’est transformé en combat pour quelques-uns, destiné d’un côté à répondre aux besoins immédiats de l’électeur « ici et maintenant » et, de l’autre, à offrir la victoire à des clans d’intérêts particuliers.
Faute de rêve, elle a sombré dans la démagogie et dans le populisme.
Alors que c’était sa raison d’être, la construction de l’avenir n’a plus cours. Elle est du domaine de l’imaginaire et par conséquent du domaine purement intellectuel, c’est-à-dire extrapolitique.
Et si, par extraordinaire un discours, comme le discours européen, échappe à la contingence, il est qualifié de « hors sol » ou de déconnecté du réel, discrédité et méprisé par les adeptes médiatiques de solutions imposées par des slogans primaires.
Pendant ce temps, des régimes autoritaires préparent l’avenir, leur domination sur le monde libre et construisent avec leur politique l’asservissement de l’individu par un clan.
La liberté individuelle reste le fondement de la démocratie. C’est en cela qu’il faut persister à la défendre, malgré ses immenses défauts.
Mais on la défend bien mal, à la veille de cette élection présidentielle, lorsque les cancrelats médiatiques préfèrent mettre en avant des oppositions factices de personnes et d’égos plutôt que de mettre en lumière les trois modèles qui s’affrontent, réduits désormais à leur plus simple expression : la défense de la liberté individuelle dans le respect des droits de l’homme contre le Tout Pour Ma Gueule dans une société fermée et la disparition de l’individu au profit du collectif.
Et tout aussi mal lorsque les candidats préfèrent dénigrer leur presque semblable plutôt que d’affirmer leur propre originalité.
Une campagne électorale n’est certes presque toujours qu’une bataille de chiffonniers.
Mais curieusement, ce sont, cette fois, les chiffonniers du même gourbi qui se battent entre eux…