Ça va cogner

On ne peut pas dire que la nouvelle ait fait un tabac. Sous couvert d’une haute technicité comptable à réserver aux initiés ce fut : silence et bouche cousue.

Alors que la chose dont il s’agit est la plus simple et la plus ordinaire qui soit, accessible à tous cerveaux, même du type reptilien. La preuve, je crois avoir compris.

Je vous explique ce que j’ai compris.

En 1974 des petits malins — beaucoup plus malins que moi — ont créé des associations loi de 1901 qui se chargeaient d’une sorte de contrôle des déclarations fiscales des travailleurs indépendants, moyennant une adhésion de 200 € annuelle. Ainsi naissaient les OGA ou AGA.

Se rendant intéressantes auprès du fisc, ces associations ont réussi à le persuader qu’elles avaient les moyens d’être des indics fiables pour lui.

Chaque délation méritant salaire, elles obtinrent que leurs adhérents aient un abattement de 20% sur leurs revenus du simple fait de leur adhésion, sans autre considération.

Un beau geste pour le délateur, une forte incitation à adhérer pour les entrepreneurs.

Puis, en 2006, Bercy décide de supprimer cet abattement. Hurlements des délateurs, qui assurent le gouvernement de leur servilité et de leurs loyaux services de délateurs.

Emu aux larmes, Chirac règle le problème à sa façon, type « et que je te tape sur le cul de la vache ».

On supprime bien alors l’abattement, mais en compensation ceux qui ne sont pas inscrits à une AGA se voient imposer sur 125% de leurs revenus.

Vous avez bien lu : celui qui ne va pas payer une cotisation à son délateur personnel est imposé sur une somme de 25% de plus que ses revenus. Il s’agit donc d’un impôt sur un gain fictif, inexistant.

Evidemment les QPC ont afflué, nos merveilleux garants de la constitution, de l’égalité des Français devant la loi, ont confirmé que faire payer des impôts aux français sur des gains fictifs est parfaitement normal, conforme à la constitution.

Elle est si « fiscale » cette constitution…. Ça fait rêver.

Tout allait bien dans le meilleur des mondes AGA, quand… soudain… le législateur décide cette année de supprimer, en trois ans, l’imposition sur le gain inexistant. Dans trois ans tous les travailleurs indépendants, AGA ou pas, paieront l’impôt sur leurs vrais revenus.

Evidement chacun aimerait payer un jour le vrai impôt sur le revenu, l’impôt juste et nécessaire, et non le pillage actuel extorqué au profit des hommes de l’Etat, mais pour cela il va falloir attendre encore un peu…

Donc Aga ou non, tout le monde paiera l’impôt sur ses seuls revenus. Les AGA paniquent à l’idée de perdre leur monnaie d’échange. Qui va payer une adhésion pour rien ?

Que s’est-il passé ? Les collègues de Macron se sont-ils foutus de sa gueule lors de sommets mondiaux ? Faire payer des impôts sur des gains légalement fictifs était une exclusivité mondiale pour la France, une de plus.

Je ne suis pas suffisamment introduit à Bercy — ou plutôt je n’y suis pas introduit de la bonne façon — pour être informé sur ce genre de chose.

Alors je réfléchis et je me dis

La révolte des délateurs est feutrée mais considérable, lourde de menaces. Bercy parait insensible. Que se passe-t-il ?

Les délateurs auraient-ils joué double-jeu ? Par exemple auraient-ils donné quelques adhérents à l’ogre tout en couvrant la triche des adhérents les plus influents ?

Ou est-ce un coup de semonce de Bercy qui veut davantage d’adhérents sacrifiés sur l’autel de la répartition égalitariste ?

La masse des adhérents aux AGA serait-elle si considérable que les seuls non-adhérents ne fourniraient plus assez d’opportunités à nos zélés contrôleurs fiscaux ? La comptabilité des non-adhérents serait-elle finalement plus sincère que celle des adhérents aux AGA ?

Ou, autre hypothèse, Bercy s’apprête à frapper si fort qu’il ne veut pas avoir de reconnaissance à trimbaler, même au profit de ses plus vieux délateurs.

Tout cela est énigmatique. Quoiqu’il en soit, les délateurs sont plusieurs milliers qui vont perdre leur gagne-pain, et du même coup leur pouvoir…

Avouons que le drame qui se noue est terrible.

Vous n’êtes pas, comme moi, obligés de vous marrer.

Vous n’avez peut-être pas jugé utile de considérer que vos déclarations de revenus étant sincères vous n’aviez aucune raison d’aller vous mettre tout nu devant des inconnus à la fiabilité douteuse.

Trop tard dans ce cas.

Que voulez-vous, il va bien falloir que les délateurs dénoncent à fond pour sauver leur peau, y compris en donnant à l’ogre les plus réglos d’entre vous.

Ne dramatisez pas, vous verrez, lorsqu’ils vous auront tout fait, tout pris, si vous êtes encore vivant vous relativiserez.

Quant à nous, les anti-AGA, rien ne dit que la majoration ne va pas perdurer, en effet seul 5% de cette majoration ont disparu.

Si les AGA dénoncent plus que ce que l’ogre croit pouvoir trouver lui-même chez leurs adhérents… rien n’est joué. Les limites de la délation sont infinies, tout comme le cynisme et la cupidité de Bercy.

Bien à vous. H. Dumas

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A propos Henri Dumas

Je suis né le 2 Août 1944. Autant dire que je ne suis pas un gamin, je ne suis porteur d'aucun conseil, d'aucune directive, votre vie vous appartient je ne me risquerai pas à en franchir le seuil. Par contre, à ceux qui pensent que l'expérience des ainés, donc leur vision de la vie et de son déroulement, peut être un apport, je garantis que ce qu'ils peuvent lire de ma plume est sincère, désintéressé, et porté par une expérience multiple à tous les niveaux de notre société. Amicalement à vous. H. Dumas

5 réflexions sur « Ça va cogner »

  1. Préciser : AGA association de gestion agréée

    Bon, quand j’étais profession libérale, je n’ai jamais eu de problème avec l’association de gestion agréée à laquelle j’avais adhéré. Contrôle essentiellement formel.

      1. Simple : juste pour bénéficier de l’abattement de 20%
        Sinon, aucun service rendu ; ce n’est pas eux qui te font la compta …
        Une seule fois, j’ai été obligé de fournir des justificatifs à propos de l’acquisition d’une documentation professionnelle (très chère et à l’époque il n’y a avait pas les bases de données sur internet : Jurisclasseur).

        1. Ce cadeau, qui t’a attiré, a permis au fisc d’affiner sa connaissance des différentes situations économiques. Le temps est venu pour lui de rentabiliser les informations acquises.
          Et d’éradiquer les combines que ce marché de dupes avait générées.

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