Banditisme d’Etat

Vous pensez que vous êtes un bon conducteur, respectueux des limitations de vitesse et que, par conséquent, vous ne risquez rien !

Et puis, un jour ordinaire, vous ouvrez votre boite aux lettres et le ciel vous tombe sur la tête : Un avis d’amende pour excès de vitesse dont vous ne vous rappelez pas !

A ce stade 2 attitudes sont possibles :

-soit vous acceptez et payez en vous disant que vous avez dû faire une erreur, même si vous n’êtes pas sûr du tout d’avoir commis cette infraction.

-soit vous essayez de comprendre, voire vous vous insurgez, et là vous allez de surprises en surprises !

Vous commencez par lire le document et vous n’y comprenez rien !

Rassurez-vous, c’est intentionnel !

Néanmoins, il est écrit que vous pouvez joindre l’ANTAI qui est l’organisme chargé de la gestion des amendes au 0806 606 606.

Vous appelez parce que vous souhaitez obtenir des renseignements sur l’avis …

Premier constat : Les délais d’attente au téléphone sont extrêmement longs et personne ne peut vous donner de renseignement utile car c’est le Parquet (Ministère public) qui a le dossier et que le Parquet vous … ne pouvez pas le joindre pour avoir des explications !

En outre, les renseignements communiqués sont soit inutiles, soit contradictoires soit même carrément inexacts et de nature à vous faire commettre des erreurs préjudiciables !

En fait, le système a été conçu pour que vous suiviez un parcours imposé et que vous … payiez sans discuter. D’ailleurs, on vous fait une promo : si vous payez dans les 15 jours (portés à 30 jours en cas de paiement par internet) ce sera juste 45€ au lieu de 68 !

3 cas sont prévus :

-vous payez,

-vous pouvez justifier que le véhicule a été vendu ou volé (auquel cas vous n’êtes pas responsable)

-vous avez prêté votre véhicule, et vous devez dénoncer le conducteur pour être exonéré.

Par ailleurs, il est écrit que vous devez payer le plus rapidement possible pour éviter les frais de poursuites tout en indiquant, discrètement, que le paiement de l’amende vaut reconnaissance de l’infraction et sans vous dire que ce paiement implique l’impossibilité ultérieure de contester ou même simplement d’obtenir la moindre explication.

L’erreur du système n’est clairement pas envisagée, l’hypothèse d’un contrôle abusif non plus ; quant aux droits de la défense ils se limitent à la possibilité de demander la photo !

En cherchant un peu, vous vous apercevez que le contrôle a été fait par un radar mobile c’est à dire une voiture radar ; dont on sait qu’il s’agit d’un service public sous-traité à des sociétés privées.

Ce système est basé à la fois sur la photo de votre véhicule et la géolocalisation de l’infraction avec cet élément fondamental que la défaillance d’un des deux paramètres doit entrainer l’invalidation du contrôle. Pour faire court : même si c’est votre voiture sur la photo, si la géolocalisation est inexacte, l’infraction ne peut pas être valablement constatée !

Deuxième constat : Le système est totalement opaque c’est à dire que vous ne connaissez pas les conditions du contrôle et vous ne pouvez pas les connaître hormis la photo (que vous pouvez demander) et la géolocalisation de l’infraction par indication des coordonnées géographiques. En effet, latitude et longitude sont indiquées sur l’avis (à la différence des radars fixes pour lesquels seul un point kilométrique est indiqué).

Or, rien ne permet de penser qu’il ne peut jamais y avoir une erreur alors qu’il est arrivé que le système des voitures radar soit pris en défaut notamment parce qu’il est resté calé « par erreur ou oubli » sur 70 km/h sur une route limitée en fait à 90 km/h.

Il se pose alors une double question :

– quant à l’existence d’une rémunération des conducteurs de voitures radar « au rendement » qui serait de nature à « inciter » le conducteur à « améliorer » ses résultats notamment en « oubliant », volontairement ou non de modifier les paramètres ; car finalement nous ne connaissons pas les compétences et la rigueur professionnelle de ces conducteurs. Si le système est manuel, le conducteur peut-il oublier, lorsqu’il quitte une zone à 70, de recaler le radar à 90 pour le maintenir à 70 avec fatalement une hausse significative des infractions ?

-quant à la validité de la géolocalisation en tant que moyen de preuve. En gros, si le système se recale automatiquement, peut-il simplement se tromper ou boguer et que se passe-t-il en cas d’erreur ?

Or, vous apprendrez qu’en cas de contrôle par géolocalisation, les erreurs sont fréquentes mais que l’administration rechigne évidemment à le reconnaitre car il s’agit d’un business extrêmement rentable (les amendes ont rapporté la somme colossale de 2 Mds€ en 2023).

Ce problème de la géolocalisation utilisé comme moyen de preuve d’une infraction s’est posé avec le contrôle LAPI des véhicules en stationnement et un arrêt du Conseil d’Etat vient d’énoncer qu’il appartient à l’autorité poursuivante de prouver la réalité de l’infraction et notamment qu’une vérification de la géolocalisation a bien été effectuée par des agents préalablement à l’expédition des PV.

Troisième constat : Il est évident que le système a été conçu dans l’optique d’une « course au rendement » et qu’il n’y a aucun contrôle de la réalité des infractions. Les PV sont expédiés automatiquement dans le but d’optimiser le rendement financier.

Ce sont les questions que je me suis posées lorsque pareille mésaventure m’est arrivée en mai dernier en partant pour la Grèce car, en me rendant sur Google Maps pour savoir où ce contrôle avait été effectué, je me suis rendu compte fortuitement que le point géographique figurant sur le PV ne correspondait pas du tout ; ce qui pose tout simplement la question de la validité du contrôle et par voie de conséquence de l’amende et fin fine du retrait de point !

J’ai donc contesté après avoir payé la consignation auprès du service de la DGFIP (service des impôts) qui est très difficile à joindre bien que seul habilité à recevoir le paiement.

Quatrième constat : même si vous êtes innocent, vous devez payer d’avance l’amende sous forme de consignation, sous peine d’irrecevabilité de votre recours en précisant bien qu’il s’agit d’une consignation. L’administration commet une « erreur » mais c’est à vous de payer !

En outre, en cas de contestation, il ne suffit pas d’avoir un motif, il faut aussi respecter les délais de recours qui … ne sont bien évidemment pas indiqués sur l’avis de contravention (il s’agit de l’art 530 du Code de Procédure Pénale avec des règles particulières en matière d’infractions routières). Passé ces délais et faute de consignation, vous êtes forclos c’est à dire que vous perdez votre droit à contestation compte non tenu du fait que la contestation doit impérativement être effectuée par lettre recommandée au-delà d’un certain délai.

Reste à savoir quelle sera l’attitude du Ministère Public ; étant entendu qu’il appartient à celui-ci de prouver la réalité de l’infraction ?

En effet, il existe une règle de droit essentielle : si la géolocalisation peut être retenue à charge contre le prévenu, une géolocalisation manifestement erronée invalide le contrôle et l’avis de contravention doit être annulé car on ne peut pas exercer des poursuites pénales sur le fondement de faits ou de constatations dont on sait qu’ils sont erronés !

Le Ministère Public peut annuler le PV et ordonner le remboursement de la consignation ou … vous faire citer devant le tribunal afin d’obtenir votre condamnation en essayant d’influencer le juge qui, bien souvent, n’a même pas besoin de cela (mon expérience des Tribunaux de police, en tant qu’avocat, m’a laissé quelques souvenirs mémorables) !

Cinquième constat : l’administration complexifie intentionnellement les « règles du jeu » tout en se gardant bien de vous communiquer certains éléments pourtant essentiels, notamment de procédure, afin de pouvoir ensuite commodément rejeter votre recours !

L’Etat n’attend finalement que votre soumission car le but n’est pas que vous puissiez exercer vos droits à la défense mais bien que vous passiez à la caisse ; ce qui est devenu flagrant avec l’automatisation des contrôles et des sanctions.

En fait, nous assistons au phénomène malheureusement trop fréquent de dévoiement d’un système administratif qui, sous prétexte de sécurité, poursuit un but exclusivement financier !

Conclusion : Personne n’est à l’abri d’un contrôle inexact ou abusif bien que l’administration fasse tout pour masquer cette réalité en exploitant intentionnellement des règles complexes dans le but d’obtenir, à toutes fins, un paiement.

Au moyen âge, il y avait les coupeurs de routes qui rançonnaient les voyageurs malchanceux.

Aujourd’hui, cette fonction est remplie, sans aucun complexe, par l’Etat avec la collaboration active de ses fonctionnaires !

Pour ma part, j’appelle cela tout simplement du banditisme d’Etat !

Bien cordialement à tous !

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A propos Dominique Philos

Navigateur, né en 1958, après un DEA de droit commercial de l’université de Paris I Panthéon-Sorbonne, je suis devenu Conseil Juridique, spécialisé en droit des affaires et fiscalité. L'Etat ayant décidé l'absorption des Conseils juridiques par les avocats, j'ai poursuivi mon activité en tant qu'avocat jusqu'à ce que je sois excédé par les difficultés mises à l'exercice de mon activité professionnelle. J'ai démissionné du Barreau en 1998 et partage désormais ma vie entre la France et la Grèce. Européen convaincu, je suis persuadé que le libéralisme est la seule option possible en matière économique.

6 réflexions sur « Banditisme d’Etat »

  1. On vous fait remplir un PV manuellement (bon, sur téléphone mais remplir à l’ancienne) – pas besoin d’immatriculation pour écoper d’une prune !

  2. J’ai assisté aussi (courant 2023) à une scène improbable rue saint Michel à Paris en plein quartier latin, avec toute une escouade de policier à pied (une bonne demi douzaine ou davantage, peut être une dizaine – ils étaient nombreux) entourant un seul type en trottinette et le chapitrant d’importance avant bien évidemment de le verbaliser;

    A dix flics sur une seule personne (et a priori le gars étant dans le couloir des vélos/trottinettes et pas de feu rouge à ce niveau) – quel gaspillage d’énergie pour ces agents publics et quelle honte

    Les fonctionnaire de police sont aux ordres et apparemment ils ont des ordres : sanctionner les utilisateurs de trottinette à tout prix

    C’était plusieurs semaines après ma prune et deux trois mois après la loi interdisant les flottes de trottinettes à louer – à partir de là les vis ont bien été resserrées – pas de pédagogie ou de compréhension de la part des fonctionnaires pour une fauit minime (genre griller un feu rouge dans un coin désert)

    L’objectif est bien de faire rentrer l’argent dans les coffres de l’Etat – sans commentaire

  3. au moyen Age ..il y avait les gents d armes , payés par le seigneur pour protéger les pèlerins des voleurs sur les chemins
    et au 21eme siècle il y a a l état armé de ses gendarmes qui détroussent les honnêtes gens et ce sont les bandits qui s en sortent

  4. « L’Etat n’attend finalement que votre soumission »
    L’Etat applique aux automobilistes la » loi de l’emmerdement maximum » avec l’objectif à peine voilé de nous piquer de l’argent avec le moins de contestation possible, avec ce système automatique; ça rejoint aussi les autres contraintes ou entraves à la libre circulation- ralentisseurs, ronds points rikiki, mauvaises routes, incitation aux VE avec difficultés de recharges rapides, aménagements urbains délirants : voies de ceci, voies de bus, voies de vélos, voies de piétons…..etc-……..-
    Tout cela pour dissuader in fine les automobilistes de circuler autrement qu’en transports en commun, en trottinettes ou en vélo ( difficiles à verbaliser en automatique car pas immatriculés). L’Etat ne voit pas plus loin que son capot pour préparer ainsi la fin de ses rentrées fiscales!

    1. En trottinette ou en vélo on se fait verbaliser aussi (Paris) – La maréchaussée poste plusieurs agents tôt le le matin pour cibler des personnes allant à leur travail ou des étudiants (à 8 h du matin) – par contre pour les jeunes qui font les kakous sur une trottinette passez muscade. Pour un feu rouge ou monter sur le trottoir c’est 135 euros, Ces agents vous sautent littéralement dessus d’un coin où ils s’étaient cachés (on ne les voit pas arriver) et ne font aucun cadeau. Du coup j’ai remisé ma trottinette au garage, pas question d’engraisser la municipalité sur mon – maigre – salaire. Le côté comique c’est qu’ils ont commencé par donner des aides pour acheter ces moyens de déplacement alternatifs puis ont changé d’avis et ont mis en place une politique de répression dirigée contre les engins qu’il ont initialement valorisés

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