Vocation

On a jamais autant parlé de vocation et jamais, à ce point, oublié les exigences de ce qu’elle implique.

La vocation s’est peu à peu déplacée du cercle religieux à celui des acteurs, des artistes, des journalistes ou des animateurs de télévision après avoir labouré le champ des avocats, des médecins et des enseignants.

Les vocations modernes ont pour objet de paraître ou de dominer dans le confort d’une société dont les acteurs vivent leur vie chic de Bohème aux frais de l’Etat. Une bonne conscience sans engagement moral.

Les anciennes vocations avaient pour objet de servir.

La vocation est en effet don de soi à une cause à laquelle on est appelé par une force intérieure irrépressible.

Les vocations actuelles, celles dont on parle, ont cédé aux exigences d’une société qui vénère la réussite matérielle ou médiatique de ses membres plus que leur générosité.

De telle sorte que les vocations classiques appelant leurs sujets à aider leurs semblables dans la peine, la souffrance ou la difficulté (avocats, médecins, enseignants), sont, à l’instar des vocations modernes, destinées à satisfaire l’égo de leurs sujets, devenues des machines à fabriquer profits et renommée.

Lee univers du Droit, de la Médecine et de l’Enseignement sont exemplaires de cette mutation.

Les avocats peuvent désormais refuser la désignation d’office du Bâtonnier pour défendre un accusé, quel qu’il soit, devant la Cour d’Assise sous prétexte que leur rémunération serait insuffisante. On croit rêver.

Jadis, on était désigné d’office et à titre gratuit.

L’État a modifié tout cela en instituant la sécurité sociale judiciaire. On a alors vu se ruer certains cabinets vers ces désignations d’office qui pouvaient offrir la célébrité. La vocation s’est ainsi enlisée dans les méandres de la communication au point d’en faire un moyen de chantage. Exiger plus d’argent pour défendre un accusé ou, à défaut, refuser la mission. Catilina a vaincu Cicéron.

En médecine, on observe partout la même dérive vis-à-vis de la Sécurité Sociale, aveugle aux arrangements entre soignants et malades qui la ruinent, mais c’est chez les dermatologues qu’elle est la plus visible. Ils ont disparu du secteur de la maladie et ont même abandonné aux Kinés le diagnostic du mélanome. Ils peuvent ainsi pleinement se consacrer à la médecine esthétique, plus rémunératrice, fiscalement moins contrôlée, et leur laissant un large espace de temps libre. Hippocrate est bafoué.

L’Enseignement supérieur a suivi la même voie réduisant comme peau de chagrin le temps d’enseignement des professeurs pour laisser aux pontes de la faculté le soin de monnayer leur art auprès de riches praticiens désireux de s’abriter derrière le savoir encyclopédique de la Doctrine. Par souci d’économie, l’État a fermé le lycée d’Aristote et fait empoisonner Sénèque une seconde fois.

L’appât du gain a eu raison des vocations.

L’État-providence y a contribué.

Et a fait de Tartuffe un exemple.

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