A écouter Bruno Le Maire, les prêts garantis par l’État (dits PGE) seraient une des grandes réussites du gouvernement.
C’était la stratégie présidentielle du « quoiqu’il en coute » qui va, à n’en pas douter, nous couter « un pognon de dingue ».
Rappelons-en le principe :
Toutes les entreprises qui se sont trouvées en difficulté du fait des fermetures administratives décidées par le gouvernement en raison de l’épidémie de Covid pouvaient solliciter des prêts auprès des banques ; ces prêts étant garantis à hauteur de 90% par l’Etat.
Les banques, habituellement si frileuses à prêter de l’argent à des entreprises, même en bonne santé, ont donc vu leurs créances garanties par une caution (l’Etat) présumée solvable. En clair, ces prêts sont garantis ou plus exactement gagés sur la collecte future des impôts que vous paierez et les banques sont donc assurées d’être remboursées.
Pas si sûr …
Bien qu’il soit notoire que les fonctionnaires détestent les entreprises et la notion de profit en lui préférant celles de solidarité et de répartition (étant entendu qu’ils sont eux-mêmes les premiers bénéficiaires de ces deux grands principes), le but de ces prêts était évidemment d’éviter les faillites d’entreprises et une explosion du chômage.
Ce mécanisme, dont on dira, avec beaucoup d’indulgence, qu’il partait d’un bon sentiment, est et sera la source de nombreux effets pervers dont on n’a pas fini de mesurer ni la nature ni l’ampleur.
Jugez plutôt …
-les entreprises souscrivent des prêts en général en vue de financer des investissements. Ici, ce n’est nullement le cas puisque c’est pour financer un arrêt d’activité !
Avec ce mécanisme, on a donc substitué de la dette au chiffre d’affaires et ce n’est pas une situation saine car un prêt bancaire ne correspond pas à une activité, ce n’est pas une ressource normale d’activité. Par contre, il faudra faire du chiffre d’affaires et des bénéfices pour pouvoir le rembourser.
On l’a compris, la perversité du système est que ces prêts ne correspondent pas à un investissement sur une activité future, ils ne financent rien de concret et, comme c’est une dette, il faudra quand même la rembourser. On imagine aisément que les entreprises qui étaient déjà sur le fil du rasoir, avec une rentabilité faible ou nulle, vont automatiquement se retrouver en difficulté lorsqu’il va falloir rembourser.
-Un certain nombre d’entreprises en difficulté, AVANT les mesures administratives, ont sollicité ces prêts et y ont vu une opportunité de gagner du temps. Comme toujours lorsqu’on a recours à ce type de mesures, il y a ce que l’on appelle pudiquement des « effets d’aubaine » ; c’est à dire une forme d’opportunisme. On a donc prolongé artificiellement l’existence d’entreprises en difficulté qui, sans ces prêts, auraient fait faillite quoiqu’il arrive, épidémie ou pas.
Le meilleur indicateur en est la réduction très importante du nombre de faillites en 2020/2021 par rapport à 2019.
-Le gouvernement a évidemment bien senti que tout ce montage était très fragile et a prorogé, à plusieurs reprises, la date de début de remboursement de ces prêts.
En fait, ce mécanisme est exactement le même que celui des banques centrales qui font de l’émission monétaire massive pour permettre aux Etats de financer leurs fins de mois et qui ne peuvent plus arrêter ce mécanisme par crainte que les Etats en question fassent défaut.
-Les PGE ont été consentis par des banques privées mais celles-ci ne sont désormais plus maitres de leur exécution puisque c’est l’administration qui décide qui va rembourser ou pas et quand !
On connait tous cet adage populaire : quand les dettes sont faibles, le débiteur se fait du souci pour savoir comment les rembourser mais quand elles sont très importantes c’est le banquier qui se fait du souci quant au sort de sa créance. Désormais, il faudra ajouter le cas où l’Etat empêche le remboursement !
Nous sommes entrés en plein dans un système d’économie administrée à la soviétique dans laquelle les fonctionnaires de l’Etat ont pris le contrôle indirect des banques et des entreprises et ils se sont lancés dans une dangereuse fuite en avant dans l’accumulation de toujours plus de dettes.
-Ces prêts représentent 142 Md€ et concernent 690.000 entreprises de toutes tailles. La garantie de l’Etat porte donc potentiellement sur 142Mdx0.90 = 128Md€.
Cela fait évidemment beaucoup d’argent et cela constitue une véritable épée de Damoclès sur les budgets futurs puisque le gouvernement a d’ores et déjà hypothéqué les futures recettes fiscales alors qu’il finance déjà la moitié de ses dépenses avec l’emprunt …
C’est ce que l’on appelle « Ajouter du risque au risque » et ça ne peut que mal finir.
Rappelons que le budget de l’Etat pour 2022 prévoit 494 Md€ de dépenses publiques et des recettes fiscales de 292 Md€. Je vous laisse le soin de calculer le déficit … qui est indiqué pour être de 155 Md€.
Le problème de ces prêts est leur issue. Activer le remboursement … ou pas.
-Si le gouvernement repousse sans cesse l’obligation du remboursement, ce sera alors un don fait par l’Etat aux entreprises … et ce don sera fait par les banques prêteuses « à l’insu de leur plein gré » puisque c’est elles qui ont avancé l’argent !
Les banques prêteuses vont se retrouver, du fait d’une décision de l’administration, à détenir des créances irrécouvrables. Elles devront donc, d’un point de vue comptable, sortir ces prêts de l’actif de leur bilan pour les passer par pertes et profits avec de grosses pertes à la sortie. Certaines banques pourraient même se retrouver en difficulté ; ce qui pourrait nécessiter alors d’organiser … une procédure de sauvetage des banques.
On le voit clairement, le problème de ce type de mesure est l’effet domino. Après avoir faussement prétendu avoir sauvé l’économie on aura en fait fragilisé les entreprises et les banques !
-Si le gouvernement active le remboursement, on sait qu’un certain nombre d’entreprises ne pourront pas rembourser et l’issue prévisible, pour ne pas dire inéluctable, sera la faillite.
On le sait, une entreprise qui ne peut pas fonctionner normalement va connaitre des difficultés de fonctionnement et la reprise d’activité peut être difficile. En outre, certaines ne récupéreront jamais leur niveau d’activité antérieur parce que les habitudes ont changé, le client a disparu, le fournisseur a disparu ou l’activité n’est plus rentable sous la forme précédente …
On retrouve encore une fois l’effet domino avec un risque de faillites en chaine du fait de défaillances d’entreprises dans un même secteur d’activité. (Par ex : le sous-traitant industriel qui n’est pas payé de ses fournitures par son client qui fait faillite, et qui de ce fait ne peut pas rembourser son PGE et se retrouve alors lui-même en faillite entrainant à son tour d’autres entreprises).
On ne connait pas la proportion d’entreprises susceptibles de se trouver en difficulté mais une chose est sure : le gouvernement n’a pas envie de le savoir ; et surtout pas avant les prochaines élections.
Ce chiffre varie, selon les avis, entre 10% et 30% étant entendu qu’en toute objectivité nos hauts fonctionnaires et ministres fonctionnaires n’hésiteront pas à minorer ce chiffre, voire à le dissimuler, pour éviter des conséquences fâcheuses …
Le montant de la garantie de l’Etat s’élevant à au moins 128Md€, le risque potentiel de défaut est donc compris entre 13 à 38 Md€.
Parce que vous pouvez aisément imaginer qu’une cascade de faillites entrainerait une explosion du chômage et que cela ferait très mauvais effet … juste avant les élections.
C’est un coup à les perdre !
C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles E Macron et son gouvernement veulent absolument que la BCE maintienne sa politique accommodante. Cela permet de continuer à dépenser l’argent qu’on n’a pas et de financer, à bon compte, toutes les lubies … jusqu’au moment où le château de cartes s’écroulera sur lui-même notamment si les mécanismes économiques reviennent à la normale et que les taux d’intérêts remontent (et ils vont remonter) !
En conclusion :
Les PGE sont avant tout une « solution temporaire » qui a tendance à durer dans le temps et qui n’aura, à la fin, qu’un seul effet : fragiliser les entreprises, sans doute fragiliser les banques et tondre le contribuable parce qu’il n’existe pas d’argent miraculeux et qu’à un moment il faudra bien revenir à la réalité !
On s’attend d’ailleurs à une augmentation sensible du nombre de faillites en 2022 mais l’essentiel, pour le gouvernement, est d’en déporter la manifestation … après les élections, à n’importe quel prix. Il sera alors bien temps de stigmatiser les patrons pour leur mauvaise conduite !
En résumé :
A chaque défaillance d’entreprise, la garantie de l’Etat sera activée, et comme … l’Etat c’est vous, eh bien c’est vous qui paierez.
Et si l’Etat n’active pas le remboursement des prêts, ce seront les banques qui paieront et comme toutes les banques sont impliquées … c’est encore vous qui paierez puisque votre banque a utilisé votre argent et a ouvert des lignes de crédit aux entreprises bénéficiaires (des prêts).
La solution la plus simple était évidemment de ne pas prononcer la fermeture des entreprises ; ce qui n’aurait rien couté. Mais le pouvoir n’a pas voulu prendre ce risque essentiellement par peur de voir les services de réanimation des hôpitaux submergés.
En outre, ce mécanisme a constitué, pour les petits hommes gris de l’Etat, une opportunité extraordinaire d’augmenter leur emprise et leur contrôle sur l’ensemble de l’activité économique en décidant qui va bénéficier de l’argent gratuit, qui va le prêter, qui va le rembourser et quand … ou pas !
Il est peu probable que l’enjeu des futures élections se fasse sur le terrain économique puisque nos ministres fonctionnaires ont tout misé sur le sanitaire, en assommant littéralement la population, dans le but essentiellement de masquer tous les autres problèmes. Et pourtant, ces questions ne manqueront pas de ressortir un jour ou l’autre et ce sera nécessairement une mauvaise surprise.
La seule chose qui soit certaine, c’est que ces mesures « de sauvegarde de l’économie » et du « quoiqu’il en coute » prises par le gouvernement vont couter extrêmement cher et qu’on n’a pas fini d’en ressentir les effets ; n’en déplaise à Bruno Le Maire, notre ministre des finances à l’optimisme de façade indéfectible !
Reste à savoir quelles « solutions » seront utilisées pour régler cette question qui ne manquera pas de se poser. Juste un petit rappel pour vous situer l’ampleur du problème : la dette publique française vient de battre un record historique à 2 834 Md€ au 3ème trimestre 2021.
Bien cordialement à tous !
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Je propose de garder cBruno Le Maire dans le prochain gouvernement comme ministre des finances pour qu’il nous montre qu’il « n’y aura pas de hausse d’impôts »
Quoi qu’il arrive, les entreprises ou les banques feront faillite ou bien les deux.
J’aimerais savoir comment les gérants de salles de sport vides depuis six mois comptent rembourser leurs PGE.
Vous pouvez ajouter les boites de nuit … fermées depuis 2 ans !