Virus chinois : Ça se gâte …

Le modèle mondialisé et le processus de production disséminé sur la planète commence à se gripper sous les assauts d’un simple virus !

Jusqu’ici l’épidémie était lointaine, en Chine ; autrement dit c’était ennuyeux mais pas vraiment dangereux. Seulement, le virus se propage désormais de manière inquiétante, notamment en Italie du nord ; c’est à dire juste à nos portes avec le risque évident qu’il passe la frontière … si ce n’est déjà fait !

La fébrilité des autorités commence d’ailleurs à se faire sentir surtout qu’on ne sait même pas comment il est arrivé là.

L’histoire humaine est faite d’épidémies

Bien évidemment, les épidémies ont toujours existé et le souvenir commun de l’humanité c’est la terrible peste noire qui est arrivée en Europe en 1348 et qui a anéanti entre un tiers et la moitié de la population. On évalue le nombre de morts à 25 millions !

Ce qui est extraordinaire c’est que, par une curieuse ironie de l’Histoire, le coronavirus provient, tout comme la peste noire 700 ans plus tôt, exactement de la même région de Chine, (le Hubei).

Néanmoins, la première grande différence entre le moyen Age et l’époque moderne est que la peste a été causée par la bactérie yersinia pestis et que l’on peut traiter cette maladie avec des antibiotiques alors qu’en ce qui concerne le Covid19, il s’agit d’un virus contre lequel il n’y a aucun traitement (on parle de la chloroquine qui est un traitement du paludisme mais cela reste à vérifier) et surement pas les antibiotiques ! Seule la vaccination est efficace mais, bien évidemment, il n’existe pas encore de vaccin !

La deuxième grande différence, c’est la vitesse de propagation. Il n’aura fallu que quelques semaines pour que le virus fasse son premier mort en Europe. Néanmoins, les épidémies n’ont pas attendu les moyens modernes de communication pour se répandre. La peste noire 1348 est arrivée en Europe après avoir été apportée par les mongols à Constantinople et elle voyagé en bateau jusqu’en Italie (Messine et Gènes) avant d’atteindre Marseille.

Une épidémie révélatrice de la fragilité du monde moderne ?

Beaucoup fantasment à propos du Coronavirus et adorent se faire peur ; les fausses nouvelles se répandent, le complotisme et le survivalisme se déchainent ! Les peurs ancestrales refont surface.

Certains appellent à la fermeture immédiate des frontières !

Malheureusement, il est peu probable que cette mesure soit efficace car les épidémies, comme naguère le nuage de Tchernobyl, se jouent des frontières et elles ont toujours plus ou moins suivi les routes commerciales. Les frontières n’ont d’ailleurs nullement arrêté la dernière grande pandémie, la fameuse grippe espagnole de 1919 probablement venue elle aussi de Chine en passant par les USA, avec ses 50 millions de morts.

En outre, il y a actuellement un nombre inquiétant de cas en Iran ; pays qui ne passe pourtant pas pour spécialement ouvert !

Aurons-nous droit aux prédictions des millénaristes, criant à la fin du monde et à la punition divine ?

Les flagellants, vont-ils refaire leur apparition pour expier nos péchés ?

Les Etats s’inquiètent et réagissent : la Bulgarie a fermé les voies aériennes avec Milan et les italiens en appellent à la solidarité des autres pays de l’Union Européenne.

Seulement, la solidarité européenne risque de céder le pas devant la peur. La règle du chacun pour soi refait explicitement surface dans un processus où l’homme reprend conscience de sa propre fragilité et en revient à ses sentiments primitifs ; la peur et il n’y a pas pire peur que la peur de l’inconnu, tout comme la peur de l’étranger, avec ces germes invisibles qui circulent et qui tuent !

C’est le même phénomène qui préside au rejet du nucléaire : la mort invisible qui rode …

Ce type de réaction débouche souvent sur la panique et un bon exemple en a été donné en Italie : les gens ont dévalisé les supermarchés !

En France, on ne parle même plus du décompte des morts chinois (qui s’est arrêté à 2.700) on ne parle plus désormais que des français et des italiens.

Des conséquences économiques prévisibles ?

Les conséquences risquent en tout cas d’être compliquées car notre monde est conçu sur les échanges et il risque de se bloquer, au moins temporairement, du fait à la fois de la fermeture des frontières et de la rupture des chaines d’approvisionnement.

Tout ce qui concerne les déplacements et les rassemblements de populations va se retrouver en difficulté et en premier lieu le tourisme et ses modes de transport collectif.

On commence à fermer des lignes aériennes, de ferries ou de bateaux de croisière ; tout ce qui utilise l’air climatisé collectif représente un danger. Les chinois ne viennent plus dépenser à Paris, les restaurants et les hôtels vont se vider, il n’y aura pas de jeux olympiques, plus de matches de foot, les salons sont annulés les uns derrière les autres et tous les lieux réunissant de grandes quantités de personnes vont devenir dangereux ou du moins les gens vont le penser ; ce qui, à la fin, revient au même !

Il est prévisible que les pays, comme la Grèce, dont l’économie est fortement dépendante du tourisme, vont connaître de graves difficultés si l’épidémie n’est pas jugulée d’ici le mois juin ; hypothèse extrêmement peu probable puisque nous sommes actuellement encore en phase d’expansion !

Les dégâts économiques risquent d’être donc considérables.

En outre, dans notre monde basé sur la communication, beaucoup de produits sont assemblés à partir de composants provenant de la planète entière. C’est le cas des smart phones et des ordinateurs assemblés en Chine qui contiennent des processeurs fabriqués exclusivement aux USA ou au RU. Il en est de même pour les voitures car beaucoup de composants viennent d’Asie (Chine, Corée, Japon) et réciproquement.

Evidemment, la chaine logistique mondialisée est fragile en ce sens que si un composant fait défaut l’appareil de production se bloque et beaucoup d’entreprises, dont l’activité est principalement orientée vers l’export, vont se retrouver en difficulté. En premier lieu on peut penser aux entreprises chinoises.

Une récession est donc non seulement prévisible mais probable à partir du second trimestre 2020 ; sans que l’on puisse aujourd’hui en mesurer l’ampleur car tout dépendra de la propagation du virus et de la fermeture des centres de production et … des ventes !

Le phénomène, s’il reste circonscrit, occasionnera un simple « trou d’air » qui pourra être rattrapé dans les mois suivants. Dans le cas contraire, on pourrait avoir un effet domino dont les conséquences seront difficilement maitrisables.

Un choc sur la dette publique ?

Un choc inflationniste apparaît néanmoins peu probable dans la mesure où l’effet principal de cette épidémie est un sévère ralentissement de la consommation ; bien que l’on puisse redouter des pénuries sur certains produits. Les ventes de voitures se sont ainsi effondrées en janvier de 92% en Chine, premier marché mondial, et il ne faut pas croire que cela ne peut pas arriver ici.

Par contre, si cette crise sanitaire dure, l’Etat fonctionnaire risque de se retrouver en difficulté. On en n’est pas encore là, mais si les gens ne sortent plus, ne consomment plus, il y aura fatalement une chute des recettes fiscales puisque notre système fiscal est basé pour l’essentiel sur la consommation (TVA, taxes diverses et notamment sur le carburant) alors que les dépenses continueront à courir !

L’Etat se retrouvera dans le cas typique du ménage surendetté qui ne peut pas augmenter ses revenus pour faire face à ses dépenses excessives ; et il ne faut pas perdre de vue que l’Etat vit au-dessus de ses moyens et qu’il comble le manque de recettes par l’emprunt. Le dernier rapport de la Cour des Comptes le rappelle sans ambiguïté en appelant le gouvernement au redressement des finances publiques !

Du fait du refus explicite de nos élites de réduire la dépense publique, et alors que la fiscalité se situe déjà à un niveau maximum, la trésorerie de l’Etat fonctionne « à flux tendu » et le moindre grain de sable pourrait avoir de graves conséquences. Si les recettes fiscales baissent, l’Etat n’aura pas d’autre issue que l’augmentation des emprunts car la marge de manœuvre se situe exclusivement à ce niveau.

Et, plus la baisse des recettes fiscales sera importante, plus l’Etat va devoir emprunter avec une question sous-jacente : les prêteurs, vont-ils continuer à prêter alors qu’en période d’incertitude, fatalement, les taux risquent de monter ?

Et ils peuvent monter très haut alors que les banques centrales ne pourront pas forcément enrayer un phénomène haussier, surtout si la panique s’en mêle !

J’avais déjà évoqué ce risque dans de précédents articles en fustigeant l’irresponsabilité des gouvernants et en expliquant qu’en général une crise se déclenchait à partir d’un évènement inopiné et qu’il suffisait d’un facteur déclencheur.

On se situe exactement dans ce cas de figure !

La fin de la mondialisation et le retour des chaines de production régionales ?

D’ailleurs, les bourses de valeurs ont plongé  à partir du vendredi 21 février (avec un creux le 24 février à -4% à Paris) provoquant un cumul de chute de 10% des cours. La situation semblait s’être stabilisée mercredi 26 mais le phénomène de baisse s’est poursuivi jeudi 27 avec -3.32%. C’est, à n’en pas douter, le signe que les marchés commencent à intégrer que les dégâts occasionnés par l’épidémie pourraient être beaucoup plus importants que prévus !

En soi, ces mouvements de valeurs ne sont pas nécessairement significatifs car les bourses sont toujours très réactives, surtout aux mauvaises nouvelles, et elles ont, en outre, tendance à amplifier le phénomène.

Néanmoins, ce n’est pas un bon signe … et, par un effet boule neige, il peut être un facteur déclencheur d’une crise incontrôlable …

Certains pensent néanmoins que les banques centrales vont alimenter en liquidités pour éviter la dégringolade ; mais la question qui se pose est : pour quoi faire ? Car, si l’industrie ne produit pas, si les transports sont bloqués, il n’y aura plus rien à vendre dans les magasins sauf les produits locaux. Alors, pourquoi pousser à la hausse la valeur de sociétés qui ne produisent rien !

Alors, bien sûr, on nous expliquera que tout ça c’est le résultat des excès du libéralisme apatride mondialisé ; lequel n’a évidemment rien à voir avec un virus et sa propagation. On pourrait tout autant affirmer que c’est le résultat des excès de l’étatisme et de la fiscalité excessive de certains pays qui ont poussé les entreprises à se délocaliser parce que les couts de production étaient devenus prohibitifs !

Serait-ce néanmoins la victoire des souverainistes de produire français, avec le retour au Franc et à nos frontières, un Frexit ?

Certains même imaginent même un écroulement de la Chine !

On nous explique d’ailleurs que le monde était tellement mieux quand tous les produits courants étaient fabriqués en France ; en occultant le fait que leur fabrication dans des pays à bas cout nous a procuré une hausse vertigineuse du niveau de vie non pas par l’augmentation des revenus mais par le biais de la baisse des couts d’appareils désormais indispensables à la vie courante !

Une (grande) télé à écran plat fabriquée en Chine, Corée ou Taïwan est vendue ici 800€ ; mais quel serait son prix si elle était fabriquée en France : 5.000 € ? Qui pourrait alors s’en acheter une … sans compter que nous n’avons même pas la technologie pour les fabriquer et c’est la même chose pour les smartphones et les ordinateurs !

D’un autre côté, il faut être conscient que certaines productions sont délocalisées pour des raisons évidentes de couts de production inadaptés : ainsi les masques de protection sont des produits basiques à faible marge ; faciles à produire en France ou en Europe. Leur relocalisation ne poserait aucun problème.

Enfin, il ne faut surtout pas oublier que la Chine représente 14% du PIB mondial (derrière les USA) et qu’il est hors de question de pouvoir prétendre éliminer un tel concurrent de la scène commerciale et industrielle mondiale !

Il ne faut donc pas confondre fantasmes, idéologie et réalité car, ce que ne voient pas les partisans du souverainisme dans leur désir ardent du retour à des frontières verrouillées, c’est l’adaptabilité du modèle de production capitaliste fondé sur l’entreprise.

Il est probable que cette épidémie laissera des traces mais il est certain que les entreprises sauront en tirer les conséquences. Il y aura des changements, des adaptations dans les systèmes de production et la logistique. Ils ne seront peut-être pas immédiats, mais ils interviendront comme ils sont toujours intervenus ! L’adaptabilité est le propre du capitalisme libéral … à la grande différence de l’étatisme qui, avec l’URSS, a démontré qu’il ne pouvait que faire faillite !

Bien cordialement à tous !

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A propos Dominique Philos

Navigateur, né en 1958, après un DEA de droit commercial de l’université de Paris I Panthéon-Sorbonne, je suis devenu Conseil Juridique, spécialisé en droit des affaires et fiscalité. L'Etat ayant décidé l'absorption des Conseils juridiques par les avocats, j'ai poursuivi mon activité en tant qu'avocat jusqu'à ce que je sois excédé par les difficultés mises à l'exercice de mon activité professionnelle. J'ai démissionné du Barreau en 1998 et partage désormais ma vie entre la France et la Grèce. Européen convaincu, je suis persuadé que le libéralisme est la seule option possible en matière économique.

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