Alerte rouge dans la presse subventionnée et la bonne conscience citoyenne : la fraude fiscale explose ! Peut-on trouver plus vil comportement social que celui qui consiste à se soustraire à l’impôt ? Dans les mots de Gérald Darmanin, on assiste à un « coup de poignard porté au pacte républicain ». Et dans les chiffres du syndicat Solidaires-Finances publiques, on parle de 100 milliards d’euros, chiffre énorme, rond et frappeur qui ne peut que soulever une vigoureuse indignation citoyenne. SOS, le modèle social que tout le monde nous envie est menacé par de riches prédateurs qui volent l’Etat !
Ce n’est pas tout : ajoutez la fraude sur les cotisations sociales et la menaçante « évaporation » bondit à 200 milliards. Pour les vigilants dénonciateurs, inutile de dire que si ces sommes pouvaient être récupérées, la question du déficit public, récurrente depuis plus de 40 ans, ne se poserait même pas. Il était de 60 milliards d’euros en 2017, on voit donc tout ce que les partisans de la dépense publique pourraient faire avec cette manne, à commencer par une politique écologique et une transition énergétique dignes de ce nom, comme le suggère obligeamment le magazine Marianne. Encaisser plus pour dépenser plus, en somme.
Selon ce discours, les politiques (forcément ultra-libérales) qui tentent (vaguement et sans succès, il faut bien le dire) de limiter les dépenses pour rester dans les clous d’un déficit public limité à 3 % du PIB sont un lamentable leurre. Derrière une prétendue orthodoxie budgétaire, elles cachent leur objectif destructeur, celui d’organiser volontairement la casse du service public. Les services fiscaux eux-mêmes n’ont-ils pas été amputés de 3 100 contrôleurs depuis 2010, vouant de fait la lutte contre la fraude fiscale à l’échec ? Or le financement de politiques publiques ambitieuses est à portée de la main. Il suffirait d’un peu de volontarisme politique pour mettre fin à l’indécent laxisme fiscal qui prévaut en France !
Le raisonnement semble imparable. Il a même convaincu le gouvernement dont le plan de lutte contre la fraude fiscale est examiné depuis lundi dernier à l’Assemblée nationale. Création d’un observatoire dédié, création d’une police fiscale en plus des services déjà actifs à Bercy – allons-y pour des dépenses supplémentaires, pourquoi se priver, une jolie « cagnotte » est en vue ! Et comme les hautes considérations morales de nos ligues de vertu fiscales ne valent que pour celui qui paie, jamais pour l’Etat qui ponctionne, on rajoutera un peu de « name and shame » à la délation rémunérée qui a été mise en place l’an dernier. Comme c’est charmant !
Qu’on me comprenne bien. L’objet de cet article n’est pas de légitimer la fraude fiscale. Il est de réfléchir au sens de l’impôt, dont l’étymologie nous rappelle la nature fondamentalement coercitive, et de mettre au jour le retournement qui s’est produit dans le langage et les esprits à tel point que lorsque l’Etat consent à prélever un petit peu moins sur un revenu obtenu par d’autres, on parle de « cadeau » fiscal.
Il faut remarquer d’abord que les chiffres de fraude avancés sont des estimations dont la caractéristique recherchée n’est pas l’exactitude comptable mais l’impact médiatique. De plus, une confusion volontaire est entretenue entre la fraude et l’optimisation parfaitement légale, le tout se mélangeant allègrement dans un vaste lexique plus destiné à souligner la hideur des comportements qu’à les définir avec précision : évasion, paradis fiscaux, services off-shore, comptes numérotés etc.. On nous parle donc de 100 ou 200 milliards, c’est rond, frappeur, … et gonflé.
Il faut remarquer ensuite que s’il existe un domaine où l’Etat se montre fort peu laxiste, c’est bien celui des prélèvements obligatoires (impôts et cotisations sociales). Même sans les montants attribués à la fraude, la France a encore battu son record en 2017 avec un taux de prélèvement sur PIB de 45,4 %. Soyons fiers : suivant les années, nous sommes à la première ou la seconde place mondiale !
Conclusion évidente : les Français font preuve d’une discipline fiscale remarquable !
En 2017, l’Etat français est parvenu à soutirer officiellement à ses citoyens entreprises et particuliers les modiques sommes de 674,4 milliards d’euros en impôts et 388,4 milliards d’euros en cotisations sociales, soit un total de 1 063 milliards d’euros pour un PIB de 2 290 milliards d’euros. Ajoutez à cela les 200 milliards de fraude, ou même seulement 100 milliards pour tenir compte des exagérations idéologiques, et vous arrivez à des taux de prélèvements sur PIB de 55 % ou 50 % respectivement.
D’où question assez logique : les sommes soustraites à l’impôt n’auraient-elles pas un petit rapport avec ces niveaux fiscaux assurément confiscatoires ? Et ce d’autant plus que les « services » qu’on attend de l’Etat en retour ne semblent guère à la hauteur, que ce soit sur le plan du chômage, de la santé, de l’éducation, des transports ferroviaires etc.. Même avec des prélèvements plus élevés que partout ailleurs, le gouvernement a dû lancer un « plan pauvreté ».
Et ne parlons pas des gabegies en tout genre, des bourdes à 10 milliards, des dépassements systématiques de grand travaux, des politiques sociales ou culturelles aussi effrénées qu’inutiles et des usines à gaz administratives coûteuses (même pour faire du vélo, aux dernières nouvelles), sans oublier toutes les indélicatesses financières de certains élus et fonctionnaires.
C’est pourtant un phénomène très connu, et depuis fort longtemps, que « trop d’impôt tue l’impôt » ; et la création de richesse, pourrait-on ajouter. Dans son Traité d’économie politique (TEP, Livre III Chapitre IX – De l’impôt et de ses effets en général), l’économiste Jean-Baptiste Say faisait déjà remarquer en 1803 que :
« Lorsqu’il est poussé trop loin, il (l’impôt) produit ce déplorable effet de priver le contribuable de sa richesse sans en enrichir le gouvernement. » (TEP, page 320)
Sans enrichir le gouvernement, car plus l’Etat prélève une portion importante des revenus (ou des patrimoines) des contribuables, moins ceux-ci disposent de capitaux pour investir ou consommer. Il s’ensuit un affaiblissement de l’économie et donc une diminution des revenus imposables :
« Il y a donc perte pour le contribuable d’une partie de ses jouissances, perte pour le producteur d’une partie de ses profits, et perte pour le fisc d’une partie de ses recettes. » (Idem)
A contrario, une diminution des impôts, en laissant aux contribuable une part plus importante de leurs revenus pour s’adonner à leurs activités personnelles, augmentera les recettes fiscales. Say donne l’exemple de Turgot, apportant au passage un élément de plus en faveur de la réalité empirique de la courbe de Laffer selon laquelle plus la pression fiscale augmente, plus les recettes fiscales diminuent, en raison de l’effet démotivant sur l’offre de travail :
« Lorsque Turgot, en 1775, réduisit à moitié les droits d’entrée et de halle sur la marée qui se débitait à Paris, le montant total de ces droits resta le même. » (idem)
Plus près de nous, on peut citer la hausse des recettes fiscales qui résulta de la réduction des taux d’imposition opérée par Margaret Thatcher au Royaume-Uni, ou encore les réformes libérales entreprises en Nouvelle-Zélande dans les années 1980 :
« Nous avons réduit de moitié le taux de l’impôt sur le revenu et supprimé un certain nombre de taxes annexes. Paradoxalement, les recettes de l’État ont augmenté de 20 %. » (Maurice McTigue, ancien ministre néo-zélandais)
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Aussi, avant de se lancer dans une récupération punitive quasiment policière de l’impôt, et plutôt que de payer des contrôleurs en plus, il semblerait beaucoup plus intéressant de repenser sérieusement l’ensemble du système aussi bien en matière de pression fiscale que de complexité administrative.
Au niveau particulièrement élevé où nous sommes, une baisse des taux d’imposition et la suppression de certaines taxes auront pour effet de pousser des contribuables à augmenter leur offre de travail. Je pense par exemple à des médecins qui ne se cachent pas de limiter volontairement leurs semaines travaillées en raison de la fiscalité élevée qui affecte leur revenu supplémentaire.
Il en résultera également une redynamisation de l’activité économique du fait de l’augmentation des capitaux disponibles, avec tous les bénéfices subséquents sur l’emploi et l’éradication de la pauvreté. Enfin, reviendra dans le jeu une partie des fraudeurs, c’est-à-dire ces personnes – pas forcément « riches », d’ailleurs – qui font de leur mieux aujourd’hui pour diminuer leur charge fiscale sans diminuer leur travail (travail au noir, fraude à la TVA, loyers non déclarés etc..) parce qu’elles considèrent que l’impôt a pris des proportions iniques.
Tout ceci suppose évidemment un changement radical de mentalité vis-à-vis de l’impôt. Pensé au départ pour couvrir les frais de fonctionnement d’un Etat dédié à la protection des personnes et des biens (armée, police, justice), il a été dévolu ensuite à la création d’infrastructures neutres telles que les routes, puis d’infrastructures moins neutres voire relevant de la sphère personnelle (santé, éducation) pour agir finalement sur l’intégralité du corps social par une vaste redistribution des revenus afin de gommer les inégalités et transformer la société selon les fins idéologiques de l’Etat au mépris des libertés individuelles.
Les inégalités ont-elles été gommées en France ? Nullement. Notre taux de chômage élevé et notre enseignement public délabré sont là pour en témoigner. La liberté progresse-t-elle ? Pas plus. Il faut des permis pour tout et le reste est interdit.
Le problème, c’est que si les fins sociales recherchées n’ont pas été atteintes, les prélèvements obligatoires n’ont jamais cessé d’augmenter dans le cercle vicieux d’un « toujours plus » qui a fini par entamer sérieusement les raisons des contribuables de consentir joyeusement à l’impôt – et encore, comme on l’a vu, les Français sont pourtant exemplaires pour payer et repayer à mesure que les politiques publiques sont des échecs.
Si l’Etat peut encaisser des impôts, c’est uniquement parce que des personnes privées ont créé une richesse qui leur appartient entièrement au départ. En aucun cas le fait pour l’Etat de ponctionner une part plus faible de cette richesse ne peut s’assimiler à un cadeau fait à ceux qui la produisent.
Malheureusement pour nous, dans l’esprit de nos collectivistes enragés, tout se passe comme si l’homme venait au monde non pas avec des droits naturels comme la liberté, la propriété et la sécurité, mais avec un devoir naturel qui prime sur tout le reste, celui de tenir tout son revenu et tout son patrimoine à la disposition discrétionnaire d’un Etat omnipotent, omniscient et omniprésent.
C’est ainsi que dans un complet renversement de valeur, celui qui produit devient le voleur tandis que celui qui ponctionne sans jamais rien produire se transforme opportunément et sans aucun fondement moral en victime de la prédation du premier.
sur le web https://leblogdenathaliemp.com/2018/09/19/sos-impots-en-danger-des-francais-hostiles-volent-letat/
les impôts servent à maintenir la pléthore de ponx inutiles voire nuisibles à notre économie, de 1 à 4 millions selon les théories politiques libérales jusqu’à la minarchie.