Il a bien fallu la faire interner. Pour son bien. Pour le bien de tous.
La trépanation s’est déroulée normalement, la semaine dernière. Elle va déjà beaucoup mieux. Elle envisage même de prendre un abonnement Canal+, Disney et Netflix (à un prix avantageux) et de faire barrage en 2022. Elle ne lit plus du tout. C’est quand même rassurant. On va pouvoir passer les fêtes ensemble, maintenant qu’elle accepte de porter son masque chirurgical à table. « Je prends une bouchée, je remets le masque. Je prends une bouchée, je remets le masque ». C’est difficile pour elle, on se rend bien compte que la trépanation l’a rendue un peu plus lente, mais elle retient, à la longue. Elle trouve même ça amusant. J’espère que mon témoignage servira d’exemple. «
VERSION FRANCE INTER (la voix de son maître) et des experts.
Et on commence de suite par le plus évident. Il faut bien sûr éviter, du mieux qu’on peut, d’être conflictuel ou agressif.
L’idée c’est de voir ce proche, non pas comme un adversaire, mais comme une victime.
Et ça n’est pas toujours facile, on a parfois en face de soi, un individu désagréable, braqué ou orgueilleux.
Reste qu’il faut essayer de trouver un terrain d’entente, en insistant sur les choses qu’on partage. Et pourquoi pas, lui dire qu’on l’aime, qu’on s’inquiète. Rappeler les bons souvenirs qu’on avait avant qu’il ne bascule.
L’important c’est de garder un lien. Parce qu’on est encore une opportunité de retour au réel.
Plus facile à dire qu’à faire, non ?
Bien sûr. Il faut bien comprendre que ses croyances font partie de sa vision du monde, voire de son identité. Remettre ça en cause, ça revient à se remettre profondément en question. Et ça prend du temps.
On peut malgré tout essayer d’engager un échange. Et plutôt en tête-à-tête. Pas en public, encore moins à table en famille, ou pire sur les réseaux sociaux.
L’idée, c’est de placer l’échange dans le cadre de l’intimité, sans regard extérieur, pour que ça ne devienne pas une sorte de spectacle ou un jeu de postures.
On peut lui demander par exemple si quelque chose pourrait lui faire changer d’avis. Et si oui quoi ? Et broder là-dessus.
Lui demander quelles sont ses sources, et si on peut s’interroger sur leur fiabilité, comme il le ferait, avec les médias qu’il appelle « mainstream » ou « officiel ».
Mais on peut aller plus loin, non ?
Il faut tenter de se focaliser sur un point et essayer de ne pas trop se disperser. S’il pense par exemple que les vaccins causent l’autisme, il faudra tenter de lui présenter des contre-arguments spécifiques, quitte à y revenir.
On peut aussi parfois, s’il croit à quelque chose d’improbable qui va survenir, lui proposer un deal. Vous lui dites que si ça se passe comme il le prédit, vous vous remettrez en question, si non, c’est à lui de le faire.
Et si rien ne marche ?
Parfois, il faut savoir mettre un pas de côté. Et lâcher prise. Pour essayer de pas briser ce qui reste de lien entre vous.
Et surtout ne pas oublier, que dans ce type de situation, il faut aussi prendre soin de vous, parce que vous êtes, vous aussi, une victime collatérale de ces dérives complotistes.