Il est clair que Marine Le Pen n’a aucune sympathie pour les gens comme moi, qui défendent la liberté, le droit de propriété, la nécessité du capital, le mérite et les élites qui en découlent, en un mot le capitalisme démocratique et son économie inclusive — comme il est convenu de l’appeler depuis le dernier Nobel d’économie –.
Bien sûr, ce manque de sympathie de sa part pour la société que je crois juste, qui n’est que celle décrite par notre constitution, m’amène à mon tour à ne pas avoir une grande sympathie pour les méthodes et les idées qu’elle véhicule.
Et cependant, je trouve ce qui lui arrive intolérable.
Quand j’entends le ministre de la Justice, Didier Migaud, déclarer qu’il faut que la justice soit la même pour tout le monde : je rêve. Il a vu ça où ? Désolé pour la facilité, mais je trouve son discours « nigaud ».
Revenons sur le sujet Le Pen, qui en réalité est le sujet, jamais réglé, du financement de la politique.
Au temps lointain de ma jeunesse, les prétendants à la politique avaient le plus souvent précédé leur prétention d’une activité professionnelle qui leur avait fourni les moyens du bénévolat qu’était alors l’acte politique.
Puis l’enrichissement soudain et mirifique du pays pendant les trente glorieuses a changé la donne. Les impécunieux ont réclamé le droit à l’accès au pouvoir politique.
Cela a paru normal, ça l’était probablement, peut-être…
Mais s’ils obtinrent assez rapidement, une fois élu, des émoluments importants pour ce bénévolat, le problème de la mise de fond initiale n’a pas été évoqué.
L’économie se portait alors si bien qu’il parut naturel de la mettre à contribution. C’est ainsi que les élus et leurs partis politiques ont organisé une corruption hors du commun en échange d’autorisations bidons payées grassement.
Ce que j’en connais personnellement, pour l’avoir vu sans y participer, ce sont les pots de vins liés à la loi Royer pour obtenir les autorisations d’implantation de la grande distribution et les monopoles qui vont les tuer, ou encore les demandes de permis de construire et les trafics sur la constructibilité des terrains à travers les POS et PLUI.
Je suppose qu’il en a été de même, à plus grande échelle, dans les autres secteurs de l’économie : l’industrie, les services, etc…
Toute cette corruption aurait dû finir devant la justice dont parle le « nigaud ». Mais, comme elle n’existe pas, il a été inventé la loi sur le financement des partis politiques en même temps que l’on décorait et honorait les coupables.
Cette loi de financement des partis politiques n’est ni plus ni moins qu’une prime à ceux qui sont en place, puisque ce financement est calculé sur le nombre d’élus ou de voix.
Comment financer la phase qui précède ?
C’est le problème Le Pen, c’est le problème de toute pensée politique qui souhaiterait convaincre les Français. C’est stupide et injuste.
C’est le fromage et le monopole pour les partis en place, c’est cette situation qui génère une armée d’hommes politiques sans intérêt, sans idée, juste intrigants.
Comment expliquer que les magistrats fassent, dans le cadre de l’affaire du RN, comme s’ils ne savaient pas tout cela.
Nous voilà arrivée à la consanguinité intellectuelle de nos élites.
Du fait que la sélection mise en place est unique, les élites ont tous le même angle de vision de la société, qui est la connaissance par l’enseignement.
Or l’enseignement, lorsqu’il n’a comme initiateur que la sélection scolaire, fabrique des scolaires uniquement. Ils se regroupent entre eux dès le plus jeune âge à l’école, ils ne vont plus se quitter, même quand ils se crêpent le chignon.
Leur éveil à la vie est consanguin.
L’élite, comme pour les arts, chanson, cinéma, etc…, devrait être diverse, multiculturelle, c’est une nécessité absolue.
Or la justice est à ce sujet particulièrement figée. Tous les magistrats sont formés à la même école, ils raisonnent et pensent tous pareils. Je les rencontre un peu partout en France, les têtes changent à l’extérieur, mais l’intérieur est partout identique.
Donc, Marine Le Pen n’a rien compris. C’est grave pour elle…
Les magistrats sont sincères, ils ne la visent pas particulièrement. Lobotomisés par leur école, ils ont été limités dans leur capacité à voir au-delà de l’instant présent, à aider à la création d’une réflexion qui devrait normalement générer une jurisprudence, essentielle à une démocratie, que nous n’avons pas.
Ils ne sont pas capables d’analyser la sottise du financement des partis politiques et la relativité de la combine employée par le RN pour financer son aventure politique.
Entre nous, que l’argent dévolue à la politique y reste, comme dans le cas des fonds européens utilisés par le RN, où est le scandale ailleurs que dans la pesanteur lourdingue des prétoires ?
Mais, comme je ne pense pas que Marine Le Pen ait comme ambition de casser la consanguinité élitique, mais de s’y fondre, je ne verserai pas une larme pour elle. Je les garde pour nous, qui allons devoir assumer la ruine et peut-être la guerre où nous mène la fadeur morale de la consanguinité intellectuelle de nos élites.
Bien à vous. H. Dumas