David Graeber, anthropologue américain, a écrit un livre qui fait parait-il fureur aux Etats-Unis : « Dette, 5000 ans d’histoire ».
Ayant probablement des comptes à régler avec les économistes, il prétend tailler en pièce l’idée commune que la monnaie serait issue du troc, lui-même l’ancêtre de l’économie. Pour cela il avance le fait que la monnaie serait apparue plus de 3.000 ans av JC, en compensation d’échanges humains, bien avant les échanges de biens.
Cet argument n’est pas convaincant. En effet, les sociétés utilisant la monnaie à usage exclusif d’échanges humains étaient autosuffisantes, localisées, et n’avaient donc pas d’autre troc à engager que celui de leur personne. Laquelle représentait la totalité des valeurs connues de force et sans doute de beauté. Il s’agit donc dès le départ d’un troc, même si aujourd’hui cette idée de la valeur humaine ramenée au stade de marchandise peut nous heurter. Par ailleurs, parler de la réalité des sociétés humaines de cette époque, dont nous n’avons pratiquement aucun reste, relève plus de la lecture dans le marc de café que de la science.
Ceci dit, le livre de Graeber est passionnant.
On y découvre une chose essentielle, c’est la constance de l’esclavage à travers les millénaires, qu’il définit de la façon suivante (telle que je l’ai comprise) : une perte d’existence sociale due à une dette transformée par le créancier ou son représentant proclamé, à l’aide de la violence et du déracinement, en soumission totale allant jusqu’à la perte de la personnalité, créant ainsi un esclave. La dette initiale pouvant être ponctuelle due à un individu ou à une défaite, ou générale due à Dieu.
La dette de l’homme devient l’homme lui-même dont la propriété est transférée au créancier ou à son représentant.
Que l’homme ait besoin d’une excuse pour pouvoir dominer d’autres hommes par la violence au point d’en faire des esclaves, ce qu’au fil des pages et des millénaires visités Graeber démontre, n’est pas une surprise. Ce qui est plus surprenant c’est l’idée que l’homme puisse être un esclave, notamment un esclave consentant qui accepte sa condition, par la force de la dette.
Cela est-il transposable à notre société ?
Graeber dit ceci : » Aux yeux d’un Grec antique, la distinction entre un esclave et un travailleur salarié endetté aurait surement fait figure, au mieux, de subtilité juridique ».
Je trouve la formule exagérée, pour deux raisons :
– Une grande partie des esclaves grecs étaient les vaincus des guerres entre cités.
– Le salarié occidental n’est pas obligé d’emprunter, alors que le grec en difficulté économique n’avait pas d’autre solution.
Cependant, la comparaison n’est pas aussi extravagante qu’il y parait. Effectivement l’endetté se trouve en situation de ne pouvoir échapper aux contraintes du créancier qui peuvent aller jusqu’à le ruiner totalement, le déraciner, le désocialiser, en faire un SDF, soit un statut aussi misérable que l’esclavage.
Il n’en reste pas moins que nul n’est obligé de s’endetter. C’est pourquoi la situation de la dette individuelle ne me parait pas vraiment comparable à celle des esclaves du passé.
Il n’en n’est pas de même pour la dette collective
Graeber attire notre attention sur le fait que la dette peut être collective. Par exemple en Inde, les brahmanes : « ressuscitent de vielles idées comme la conception védique d’une dette à l’égard des dieux, des sages et des ancêtres, mais en l’appliquant désormais uniquement et spécifiquement aux brahmanes, qui ont le privilège et le devoir de représenter toute l’humanité devant les forces qui contrôlent l’univers. » Voilà nos brahmanes autoproclamés créanciers au nom des dieux, la populace doit payer la dette divine.
Cela ne vous rappelle rien ? Moi, si : Nos socialistes
A longueur de déclarations, nos socialistes ne cessent d’affirmer que celui qui possède a une dette envers celui qui ne possède pas. Au nom de cette dette, le socialiste (de droite ou de gauche) qui se prétend le représentant éclairé de la justice en ce monde, de l’égalité, de la fraternité, nous impose son remboursement.
C’est-à-dire qu’au-delà des frais imputables aux activités que seule la collectivité peut prendre en charge, l’armée, la police et la justice, au nom d’une dette envers les faibles nous sommes dépouillés par ceux qui se prétendent leurs représentants.
Nous sommes devenus les esclaves d’une dette inexistante, irréelle, au nom de laquelle nous sommes dépossédés de nos biens, sans limite.
Ceux qui ont eu à affronter un contrôle fiscal savent, qu’au nom de cette dette, tout ce qu’ils possèdent peut leur être pris. J’ai bien dit tout.
Voilà qui donne un sens à la lutte venir.
Nous devons obtenir l’abolition de notre esclavage, refuser cette dette inexistante. Ceux qui travaillent et économisent ne doivent rien à ceux qui n’en branlent pas une.
Il faut que cela soit clair.
Mais l’abolition de notre esclavage ne suffit pas, il faut aussi que le mal qui nous a été fait soit réparé, au moins en partie. Il faut que tous les contrôles fiscaux passés soient déclarés nuls, et actes illégaux aboutissant à un inacceptable esclavage de fait.
Ce Jeudi 9 Janvier, deuxième jeudi du mois, de 18H à 19H devant Bercy, nous serons déterminés, nous serons la conscience qui doit obtenir l’abolition de l’esclavage fiscal.
Merci à Graeber, dont je ne suis pas sûr que son idée était d’aboutir à nos conclusions,mais merci quand même à lui de nous avoir ouvert les yeux sur notre vraie condition, notre condition d’esclave fiscal. Je vous conseille bien évidemment la lecture de son ouvrage.
Bien cordialement. H. Dumas
Un vrais plaisir de vous lire avec ce billet, je vous en remercie enormement !!!
Il est magnifique ce blog. C’est du travail de pro. On est gâtés pour cette année. Merci.