C’est une particularité française, sans doute unique au monde : avoir des centaines de variétés de fromages… et d’impôts.
Pour ce qui est du nombre d’impôts et de taxes, en revanche, le débat est ouvert, aucune autorité morale ou professionnelle, administrative ou civile, technique ou arbitrale n’ayant jamais réussi à démêler précisément et de façon incontestable l’écheveau administratif, le fouillis technocratique et le millefeuille fiscal qui planent sur les têtes des Français. Ce qui a pour résultat qu’un brouillard bien sombre et bien épais enveloppe notre pays, un brouillard soigneusement entretenu par les apparatchiks de Bercy.
Alors, combien ? Il y a quelques années, en 2013, le ministère des Finances admettait du bout des lèvres avoir recensé près de 180 impôts, ce qui apparaissait comme une clause de style. Agnès Verdier-Molinié, qui dirige l’iFRAP, cercle de réflexion indépendant dont l’objectif principal, avec une calculatrice en main, est d’examiner à la loupe les politiques publiques, arrive au double : 360 taxes et impôts, parmi lesquels 192 taxes « à faible rendement ». De son côté, Étienne Lefebvre, rédacteur en chef aux Échos, citant « l’incroyable complexité du système fiscal français », signale « quelque 450 dispositifs fiscaux répertoriés »…
Redistribution et incitation
Le journaliste économique François Lenglet, il y a trois ans, dans une émission de France 2, a posé la question qui fâche à Gilles Carrez, un député de droite qui présidait alors la commission des Finances de l’Assemblée. Sa réponse : plus de 1 000 taxes différentes, ce qui, pour le coup, paraît bien excessif. « En France – et c’est une particularité de notre pays –, a-t-il répondu, la fonction première de l’impôt, c’est-à-dire couvrir les dépenses publiques, a été perdue au profit de deux autres fonctions. La première est celle de la redistribution : au nom de la justice, les riches doivent payer davantage que les pauvres. La seconde est celle de l’incitation », qui consiste à « orienter les comportements des entreprises ou des ménages » en « manipulant l’impôt ». « Je pense que nous dépassons les 1 000 taxes », a-t-il donc précisé, car « n’oubliez pas ce qui relève des collectivités locales, par exemple, la taxe de balayage qui est très ancienne ».
Pour Rémi Godeau, le rédacteur en chef de L’Opinion, « comment ne pas être exaspéré par une accumulation d’annonces où il n’est question que de brider nos libertés, rogner la propriété, imposer une moralité ? […] Le feu d’artifice des prélèvements instille l’idée que ponctionner revient à solutionner, grever à régler, saigner à soigner. » Que viennent faire dans une économie moderne, en effet, la taxe à la production sur le quota de sucre, le quota d’isoglucose et le quota de sirop d’inuline (sic), la taxe sur les farines, semoules et gruaux de blé tendre, les droits de circulation sur les vins, cidres, poirés et hydromels, la taxe sur les remontées mécaniques, les rhums, les pylônes, le ski de fond, les friches commerciales, la certification des plants de vigne ?
Est-on à ce point devenu drogué aux taxes à Bercy, où l’on est même capable d’ajouter des taxes sur des taxes, comme c’est le cas sur les carburants ? Les taxes sur le diesel et l’essence, qui représentent déjà près de 60 % du prix de vente à la pompe, ont été complétées au 1er janvier dernier par une nouvelle taxe de 7,6 centimes par litre pour le diesel et de 3,9 centimes pour l’essence, et au 1er janvier 2019, elles le seront encore de 6,5 et 2,9 centimes. Comment le président Macron a-t-il pu laisser Bercy continuer ainsi son œuvre de destruction du pays en ajoutant en plus d’autres nouvelles taxes dès son arrivée à l’Élysée, dont la ridicule taxe « cabanon » sur la construction des abris de jardin, et la superfétatoire taxe Gemapi, sur la gestion des milieux aquatiques ?
« Obsédés fiscaux »
Thierry Benne, pour l’Iref (Institut de recherches économiques et fiscales), considère que nos dirigeants sont « de véritables obsédés fiscaux » pour lesquels « toute occasion est bonne de pousser un peu plus loin le curseur des prélèvements fiscaux qui saignent le pays et qui, sans jamais diminuer la dépense publique, rognent à chaque fois le peu de compétitivité qui lui reste ». En tête de cette « obsession coupable » figure, d’après lui, « l’écologie punitive – le vert fouettard –, prélude à tous les excès et à tous les gâchis ».
Pour l’avocat André Touboul, auteur de l’essai Les Cinq-Mille. Fortune et faillite de l’élite française (Le Cherche-Midi), « il n’y a aucune raison pour que les bureaucrates changent de comportement. Ils ont, depuis des décennies, les mêmes professeurs dans les mêmes écoles qui en sont restés à l’économie dite keynésienne. […] Certes, on les entend s’interroger sur la dépense publique, mais un peu à la manière des alcooliques anonymes, sans y croire vraiment. » À Bercy, des bureaucrates ou des bourreauxcrates ?
On a beaucoup entendu parler ces dernières semaines de la suppression étalée dans le temps de ces « petites taxes » qui ont un rendement inférieur à 150 millions d’euros et des frais de collecte élevés. Le budget 2019, selon l’iFRAP, « devait comporter une première vague de suppressions de petites taxes pour 200 millions d’euros. Il n’en sera rien. Seule une vingtaine sera supprimée en 2019, pour 131 millions d’euros ». L’iFRAP a calculé qu’à ce rythme, il faudrait 40 ans pour toutes les supprimer ! Ce n’est donc pas demain que le nombre des centaines de variétés d’impôts redescendra en dessous de celui des variétés de fromages.
Dès lors, pour reprendre les mots de Winston Churchill, si un pays « capable de donner au monde 360 fromages ne peut pas mourir », quelle est la durée de vie en bonne santé d’un pays dont les dirigeants sont capables de matraquer fiscalement à ce point leurs propres concitoyens, ce qui les empêche de respirer normalement ? La réponse à cette question devient urgente.
Moi, j’aimerais connaître le montant des revenus de tout les français, revenus brute, charges patromales incluses, plus value divers , revenus mobiliers; tous sans exceptions