Formidable. C’est un peu comme si le réalisateur, ayant décidé de vulgariser les activités et les personnages de l’hôtellerie internationale, avait cadré son récit sur la vie de Paris Hilton. Le décalage est du même niveau, le résultat est évidemment nul.
On y voit des banquiers gras et dodus, aux dialogues débiles, se livrer à des activités de type Monopoly simplifié pour 6 à 10 ans.
Aucune réflexion sur la banque et les banquiers, rien. Le désert intellectuel.
Quant aux acteurs, on ne peut pas dire que la mise en scène les met en valeur. Ce pauvre Gad Elmaleh risque d’y perdre ses amitiés monégasques, qu’est-il allé faire dans cette galère ?
Tant de bêtise fait réfléchir. Comment raconter la banque et les banquiers actuels, modestement et simplement ?
Proposition :
Un grand nombre de français ne voit jamais un banquier pour autre chose que de déposer chez lui leurs salaires, avoir un chéquier et une carte bancaire, avec le sentiment que leur argent à la banque est en sécurité et leur comptabilité bien gérée.
Ils sont à mille lieux d’imaginer la réalité primaire de la banque.
Il est bon de leur rappeler que le banquier vit des crédits qu’il consent, que si aujourd’hui le banquier vit au dessus de ses moyens, matériels et intellectuels, c’est parce que son activité de prêteur l’a enrichi anormalement.
D’où le côté gras et dodu que le réalisateur croit devoir nous montrer. Mais il ne montre que l’effet, il oublie l’essentiel la cause.
Penchons nous sur la cause, les trois sources de crédits :
– Le crédit à la consommation. Il consiste, dans une économie en croissance, à persuader les gens qu’ils peuvent posséder avant et payer après, au lieu de gagner avant et d’acheter après. Grave danger en cas de récession, accompagné du risque plus classique de dépenser sans avoir la capacité de payer après, en gros de dépenser plus que ce que l’on sera capable de gagner. Disons que c’est en partie le problème classique du banquier et de son client. Problème qui n’a jamais grassement enrichi les banquiers, ni ruiné complètement des sociétés.
– Le crédit aux entreprises. Ici nous rentrons dans le délicat, le pervers. En effet la fiscalité, l’Etat donc, qui prélève sa dîme le plus en amont possible, ne permet pas à l’entrepreneur d’accumuler la trésorerie nécessaire à son extension, ou plus simplement à la marche normale de ses affaires. Toute une bande de premiers de la classe lui font croire, depuis des décennies, que l’emprunt lui permettra de payer ses impôts et sa croissance. Hélas, l’entrepreneur n’obtient par l’emprunt que fragilité et insécurité. Seul l’Etat, Bercy, y trouve son compte en taxant très en amont, totalement indifférent à la fragilité générée pour l’entreprise. Cette attitude est scélérate de la part de l’Etat, mais aussi du banquier qui touche des intérêts injustes en sachant parfaitement qu’ils sont assis sur des prêts inutiles qui tuent son client. Mais ce gisement artificiel est là et enrichit indument le banquier.
– Le crédit aux collectivités. Ici nous abordons l’inacceptable, le sordide. Avec pour seul objectif leur élection, les politiques empruntent plus que de raison pour épater leurs électeurs. Disons-le clairement, pour les éblouir et les acheter hypnotisés qu’ils sont par ces débauches d’argent, par toute cette magnificence. Alors là, les banquiers se gavent sans aucun risque. Le risque est mutualisé par l’impôt. C’est ce que les politiques appellent la solidarité.
Nous voyons donc que ces trois gisements réunis, dont deux, les plus forts, les moins risqués, sont issus des têtes d’œufs de Bercy, enrichissent de façon considérable les banquiers.
L’ensemble pratiquement sans risque, sans effort, Bercy s’occupe de tout.
Les conséquences sont les suivantes :
– N’importe quel con peut être banquier, c’est enfantin, Bercy fait le boulot, il suffit d’être nommé. En plus, la plupart du temps, c’est Bercy qui nomme.
– Etre riche est compliqué, le riche est imprévisible, mais si en plus il est con, le pire est à craindre.
Alors, en effet, gras et dodus, très peu malins, nos banquiers ont été capables d’inventions toutes plus perverses et ridicules les unes que les autres, jusqu’à se rendre si obscènes qu’un pauvre réalisateur démagogue puisse les représenter comme dans « CAPITAL ». C’est bien fait pour eux, même si c’est dommage pour la population qui passe à côté de la vérité, à la fois beaucoup plus simple et beaucoup plus grave.
Bien cordialement. H. Dumas