Nous allons finir l’année en évoquant les petites combines de nos élites pour faire surnager le système dont ils sont les premiers bénéficiaires.
L’époque est devenue difficile pour le milieu de la finance (banques et compagnies d’assurance) en raison des taux d’intérêts nuls pratiqués par la BCE.
Mais elle n’est pas plus facile pour l’Etat français qui, malgré ces taux ultra favorables, peine à financer des dépenses en constante augmentation alors qu’il se trouve contraint de limiter l’augmentation de sa prédation fiscale.
Surtout que, désormais, les deux camps ont des intérêts désormais opposés alors qu’ils ont partie liée dans la mesure où les compagnies d’assurance financent les dettes de l’Etat en achetant les émissions obligataires (OAT). L’Etat toujours plus impécunieux cherche toujours plus d’argent gratuit et le milieu de la finance recherche des placements rémunérateurs que l’Etat ne peut pas lui procurer.
Nous sommes en fait tombés au bas de la spirale infernale des taux à zéro et personne ne sait comment en sortir car si les taux montent, certes le milieu de la finance se remet à gagner de l’argent mais l’Etat ne peut plus faire face à ses dettes et comme les compagnies d’assurance dépendent de l’Etat …
De ce fait, nous assistons à des opérations financières qui relèvent du « pur équilibrisme » financier !
La participation de l’Etat au capital de PSA
En mars 2017, l’Etat, par le biais de l’APE (Agence des Participations de l’Etat), a revendu sa participation dans le capital de PSA (Peugeot-Citroën) à la BPI pour 1.92 md€.
Cette participation ayant été payée 800 millions €, lorsque PSA était en difficulté, l’Etat a enregistré une plus-value d’1.12 md€.
C’est donc une excellente opération et le gouvernement n’a pas manqué de communiquer à ce propos ; fidèlement relayé par une presse pour le moins complaisante, c’est à dire dénuée de tout esprit d’analyse voire d’esprit critique.
On en arriverait presque à croire que l’Etat stratège est un bon gestionnaire !
Sauf qu’il y a un petit détail : la BPI c’est la Banque Publique d’Investissement et elle est entièrement à capitaux publics puisque détenue à parts égales par la Caisse des dépôts et l’APE (Agence des Participations de l’Etat), qui qualifie l’opération de « reclassement à l’intérieur du secteur public ».
La BPI résulte du regroupement d’Oséo, qui participe au financement des PME et de l’innovation, du Fonds Stratégique d’Investissement (FSI), filiale de la Caisse des dépôts qui prend des participations minoritaires dans le capital des entreprises, de CDC Entreprise, filiale de la Caisse des Dépôts, qui gère les prises de participations dans les PME de la Caisse.
Ainsi donc, pour dire franchement les choses, on est en plein « capitalisme d’Etat » mais surtout, l’Etat s’est revendu à lui-même sa participation au capital de PSA en gonflant au passage le chiffre de 1.12 md €.
C’est à dire que d’un trait de plume on gonfle les actifs de 1.12 md € mais ce n’est pas qu’un jeu d’écritures car ce sont bien les capitaux de la BPI qui servent à financer l’opération ; non pas pour « aider » les entreprises mais pour permettre à l’Etat de pomper discrètement les capitaux de la BPI sans faire apparaître un emprunt (car ce n’est pas dans les statuts de la BPI de financer l’Etat) en faisant, au passage, une confortable et opportune plus-value !
Car, la BPI a pour mission de financer l’innovation, les petites entreprises et les entreprises de taille intermédiaire. Son objectif principal est d’accompagner les entreprises dans leur croissance pas de financer indirectement l’Etat !
A bien y regarder, cela ressemble étrangement à une opération de cavalerie dont on perçoit le but : récupérer à bon compte des fonds et améliorer la présentation bilancielle des comptes publics qui sont franchement mauvais.
Car, toute petite combine est finalement bonne à prendre !
Et vous noterez que cette opération a eu lieu avant le déclenchement du mouvement des gilets jaunes ; c’est dire si la situation est en train de se tendre actuellement avec une dette qui vient de dépasser les 100% du PIB à 2.415 mds €.
Conclusion : Si un jour vous avez des dettes et que vous ne savez pas comment faire pour y faire face, vous saurez que vous pouvez vous revendre à vous-même vos actifs disponibles en gonflant bien le prix et avec ce prix … rembourser vos dettes ! Magique non ? Mais je doute que votre banquier et vos créanciers apprécient la manœuvre !
Les provisions pour participation aux bénéfices des contrats d’assurance-vie
Les compagnies d’assurance-vie, qui ont quelques difficultés à trouver du rendement pour appâter les souscripteurs, ne vont pas très bien actuellement du fait de la forte diminution des taux d’intérêts alors que leurs portefeuilles sont constitués pour l’essentiel d’obligations d’Etat (OAT).
Je rappelle que ces compagnies gèrent un véritable pactole de 1.600 mds€ qui représente d’ailleurs la première forme d’épargne en France ; utilisée d’ailleurs essentiellement pour des raisons fiscales (ces placements bénéficient d’exonérations fiscales dont les épargnants adorent ; ce qui s’avère d’ailleurs logique dans un pays surimposé comme la France !).
Or, la presse spécialisée a révélé qu’ARKEA (CREDIT MUTUEL) a dû recapitaliser, le 10 octobre dernier, sa compagnie d’assurance de 540 millions €.
On ne sait pas si ARKEA a plus mal géré les actifs de ses clients que ses confrères de la profession mais nul doute que cette opération constitue le révélateur d’une situation somme toute assez peu reluisante de la profession.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, face à la diminution de leur solvabilité, plusieurs compagnies d’assurance-vie sont intervenues auprès du ministère de l’économie et des finances pour obtenir une petite modification de la législation applicable aux PPB (provisions pour participation aux bénéfices) dont le total s’élève quand même à 55 mds€.
Ces PPB constituent des revenus mis en réserve par les compagnies pour une durée maximale de 8 ans (raison pour laquelle il faut éviter de casser un contrat d’assurance vie avant son terme de 8 ans car alors on perd cette participation aux bénéfices et le rendement du placement peut chuter sensiblement). Ces PPB constituent une réserve prudentielle et concernent plus particulièrement les contrats en € (à capital garanti) que les compagnies ne proposent plus guère désormais. En effet, avec les taux à zéro, elles préfèrent orienter leurs clients vers contrats à supports en unités de comptes (actions) dont le capital n’est pas garanti (avec de gros risques de pertes en capital s’il y a un krach boursier).
Ces PPB constituent une dette des compagnies d’assurance-vie vis-à-vis des souscripteurs de contrats puisque ces sommes appartiennent à ces derniers et qu’elles ont vocation à leur être distribuées ; c’est donc un élément de passif des compagnies.
Autrement dit, par un simple jeu d’écritures, elles voudraient transformer une dette en actif et, par ce biais, gonfler leurs actifs de 55 mds € !
Audacieux non ?
Pas énorme par rapport au montant total des avoirs contractuels, mais toujours bon à prendre !
Il y a juste un petit problème juridique …
Ces sommes appartenant contractuellement aux souscripteurs, modifier la législation applicable constitue donc une violation pure et simple des dispositions contractuelles !
Mais il est vrai qu’en France, le respect de la propriété privée et des règles contractuelles est quelque chose de toute à fait accessoire … et la spoliation de l’épargnant une constante républicaine …
On se situe là carrément dans la magie financière à moins … que ce ne soit finalement qu’une escroquerie que les compagnies d’assurance cherchent à légaliser ; car le but est quand même d’obtenir une appropriation illégale de ces réserves, en violation de dispositions contractuelles (qui, en droit civil, constituent la loi des parties) !
Reste à savoir quelle va être la ficelle qui va être utilisée pour justifier cette mauvaise action mais cela vous donne en tout cas une idée de ce que pourrait être le commencement d’une spoliation étatique.
Il est évident que tout cela n’augure pas d’une bonne issue en ce qui concerne les contrats d’assurance-vie et il vous appartient de devenir particulièrement méfiants à propos de ce type de placement surtout qu’une loi Sapin II du 09 décembre 2016 a prévu de permettre le blocage « temporaire » des retraits sur les contrats d’assurance vie « en cas de besoin » afin d’éviter un « bank run » et la faillite pure et simple des compagnies d’assurance !
Conclusion : Petites magouilles financières entre amis et capitalisme de connivence sont bien les deux mamelles de l’Etat fonctionnaire !
Bien cordialement à tous et meilleurs vœux pour 2020 !
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Excellent Merci!
Info d’ANTICOR= Mais pour qui travaillent les responsables politiques ? La réponse devrait aller de soi : pour les citoyens ! On a néanmoins parfois quelques doutes… En 2017, le député François Fillon a révélé avoir reçu 200 000 euros d’AXA, entre 2012 et 2014, pour des activités de conseil. Cette année, on apprend que Sylvie Goulard a été grassement payée par un think tank, de 2013 à 2015, pendant qu’elle était députée européenne (Anticor a d’ailleurs décidé de déposer une plainte dans cette affaire).
De même, Jean-Paul Delevoye a cumulé la présidence d’honneur d’un think tank ‒ rémunérée plus de 6 000 euros par mois ! ‒ tout en étant membre du Gouvernement, ce qui est d’ailleurs inconstitutionnel. Certes, il n’y a pas « mort d’homme » selon Gérard Darmanin, mais ces curieux cumuls soulèvent la question de l’implication et l’impartialité de ceux qui font la loi.
Nous avons le plaisir de vous inviter à la Cérémonie 2020 de remise des Prix éthiques et des Casseroles, le vendredi 10 janvier 2020, à Paris, qui sera présentée par le chroniqueur Guillaume Meurice. L’entrée est gratuite mais n’oubliez pas de réserver ! = https://www.anticor.org/agenda/ceremonie-de-remise-des-prix-ethiques-et-des-casseroles-2020-a-paris/
Cordialement,
Jean-Christophe Picard
Président d’Anticor
Ce très bon papier doit être ajouté aux dépossessions de la propriété immobilière sous couvert de maîtrise de l’espace et de mixité.
La propriété privée socle de notre constitution n’est plus, alors que tous y croient encore.