C’est reparti pour un tour !
La grande annonce industrielle du moment est la nouvelle future fusion entre Fiat-Chrysler et PSA (Peugeot-Citroën).
La presse s’emballe, les spéculations vont bon train, et, comme pour la récente « arrestation » de Xavier Dupond de Ligonès, elle fait des annonces tonitruantes pour le moins spéculatives ; juste … histoire de vendre du papier !
On nous décrit une situation idyllique avec la constitution du quatrième groupe mondial derrière Renault, VW et Toyota … en reprenant les mêmes arguments que pour la fusion avortée Fiat-Renault.
L’essentiel des données que je vous avais communiquées dans mon précédent article à propos des louanges éditoriales d’une fusion Fiat-Renault reste d’actualité !
La réalité de la situation est que Fiat a des difficultés industrielles et que son avenir est compromis notamment parce qu’il est très en retard sur le concept de la voiture électrique et que ses usines européennes sont en mauvaise posture (Lancia est mort, Fiat ne survit qu’avec la 500, Alfa Roméo a une diffusion de plus en plus confidentielle malgré des modèles magnifiques mais peu fiables). Aux USA, Fiat ne survit que grâce aux Jeep et pick-ups, Chrysler étant quasiment mort !
Autrement dit, FIAT sait qu’il est sur la mauvaise pente et, aujourd’hui, c’est la métaphore du nageur en train de se noyer et qui cherche une bouée de sauvetage. Il cherche donc un partenaire susceptible de lui apporter à bon compte ces technologies qui lui font défaut sans avoir à en assumer les (lourds) investissements !
Le coup de génie de Sergio Marchione, ancien Pdg de Fiat aujourd’hui décédé, a été,en 2009, de mettre la main sur le groupe Chrysler alors en faillite ; ce qui a permis de sauver Fiat, qui allait déjà bien mal, d’une déconfiture inévitable !
Seulement, il est illusoire de croire qu’on peut renouveler tous les dix ans de tels coups car les proies de la taille de Chrysler sont rares ; d’autant plus que la famille Agnelli a une vision purement patrimoniale de la gestion de Fiat dont elle espère toujours tirer un maximum de revenus à travers la réalisation d’opérations de restructurations industrielles. La cession de la pépite Magnetti-Marelli (équipementier auto) est là pour en attester !
D’ailleurs, Fiat avant d’essayer de mettre la main sur Renault, avait essayé de se vendre à General Motors !
PSA, de son côté, souhaiterait, à en croire la presse, revenir sur le marché américain alors qu’il n’a … aucun modèle de voiture qui corresponde au marché américain ! Carlos Tavares, qui connaît les produits qu’il vend et les marchés qu’il prospecte, le sait ; donc ce ne sont que des annonces éditoriales qui ne reposent sur aucun fondement !
Dans ces conditions, PSA qui vient d’avaler avec succès Opel dont la gamme est très proche de celle de PSA, avec des synergies industrielles évidentes, pour un marché purement européen, n’a pas vraiment d’intérêt à engager des négociations avec Fiat ; surtout si c’est pour perdre le contrôle du nouvel ensemble !
Le risque industriel et financier pour PSA, qui a quand même frisé la faillite il y a quelques années et qui doit aussi gérer le problème du Brexit pour ses usines britanniques (Vauxhall), est considérable ; surtout que l’horizon de l’industrie automobile n’est plus au beau fixe compte tenu des nouvelles normes environnementales !
En outre, son actionnaire chinois (Dong Feng) souhaite se retirer du capital de PSA et l’activité de PSA en Chine est en train de péricliter !
Cela signifie que le marché mondial de l’automobile, du fait des nouvelles normes en matière de pollution et de voitures électriques, n’est plus à l’augmentation des volumes mais plutôt à la tentative (pas évidente) de consolider les situations acquises.
Cela signifie aussi que cette évolution technologique contrainte ne va pas se faire sans casse et qu’il va probablement y avoir des dégâts industriels considérables avec la disparition de constructeurs automobiles ; et Fiat est en tête de liste (après Rover, Saab).
La meilleure stratégie de PSA serait donc d’attendre et de voir surtout que l’on sait que plusieurs groupes industriels sont à l’affût et n’attendent en fait que la déconfiture de Fiat pour mettre la main sur les quelques pépites du groupe présentant un réel intérêt !
Il n’y a donc aucune raison que PSA ne fasse pas de même et il n’y a aucune urgence à se précipiter dans un montage financier et industriel risqué au terme duquel la famille Agnelli deviendrait le principal actionnaire du nouvel ensemble. La perte de contrôle capitalistique de PSA signifierait la perte de controle industrielle !
Enfin, l’Etat français, qui est aussi actionnaire de PSA (comme il est aussi actionnaire de Renault), refusera, comme il l’a fait pour Renault, que cette opération de restructuration industrielle se fasse dans un cadre de figure où la famille Agnelli prendrait le pouvoir du nouvel ensemble ! Le risque politique serait trop élevé surtout si Fiat se mettait à fermer des usines françaises pour sauver ses usines italiennes !
Heureusement, Carlos Tavares, président de PSA , qui n’est pas un perdreau de l’année, ne va certainement pas se laisser abuser par la danse du ventre de Fiat et les spéculations éditoriales n’y changeront rien !
Bien cordialement à tous !
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