J’ai à peine le souvenir d’une époque lointaine ou seuls les « blaireaux » roulaient au mazout. J’ai toujours été d’une banalité affligeante. Donc je roulais « essence ».
Je me rappelle mon premier six cylindres, puis mon premier huit cylindres.
Mes premiers 200 CV, puis 270 CV, pour finir avec 420 CV et plus de permis de conduire…
Je suis rentré dans le rang (le fisc m’a bien aidé). Je ne suis pas le seul. Dans les stations services les pompes « diesel » sont majoritaires. Je m’y suis mis. Je roule diesel, moins de 200 CV. Sur autoroute j’ai beaucoup de mal à dépasser la limitation de vitesse.
Je suis toujours à la peine pour mes points, mais c’est plus de la distraction, voir du vice de la « gendarmesque », que de la vitesse pure.
Bref, je suis dans le moule. Presque parfait. Le bruit envoutant des belles mécaniques six cylindres, le vrombissement des huit cylindres, le hurlement des quatre cylindres rageurs sont aussi loin pour moi que les diplodocus, des fossiles.
Soudain patatras.
J’apprends par la presse autorisée (link), que le diesel serait responsable de 40.000 morts par an, en France.
Au plus fort de l’hécatombe routière on ne dépassait pas 15 à 18.000 morts.
Avant je roulais vite, j’étais un assassin en puissance, maintenant je roule doucement, je suis un assassin tout court.
D’ailleurs, je vais être condamné à payer plus cher pour liquider mes compatriotes, le diesel augmente, il va rejoindre les taxes de l’essence, malin.
Quand même, quelque chose me turlupine, suis-je vraiment responsable de cette hécatombe ?
Voyons, j’ai connu le diesel sponsorisé par l’Etat sous forme de taxes minorées, où l’on me traitait de flambeur avec mes moulins à essence. Ainsi donc, tous ces gens, l’Etat, mais aussi tous les délateurs qui me regardaient de travers quand je faisais le plein en super 98, étaient donc tous des empoisonneurs !!!
Pourtant, ils portaient beau, ils avaient la morale avec eux, la modestie, ils représentaient l’avenir raisonnable.
De mon côté, je trouvais que le diesel : ça faisait une fumée noire de mauvaise augure. On m’a bien expliqué que j’étais un ignare, on a réussi à rendre la fumée incolore (quand ça marche), mais les petites particules, même sans couleur, elles tuent les gens.
Et, c’est maintenant que tout le monde roule en diesel qu’on nous le dit….
Ils n’en ont pas marre, les mecs qui font les règlements, de ces règlements intelligents qui heurtent le bon sens et finissent par être encore plus catastrophiques que ce que l’on pouvait imaginer au départ, avec notre petite intelligence modeste.
C’est complètement débilitant de voir ainsi, à grand renfort de règlements et de subventions, se créer des situations pour lesquelles il faut ensuite une nouvelle fois payer pour les modifier tant elles deviennent rapidement infernales.
Ce qui me trouble c’est que chaque échec n’apporte aucune modification, aucune remise en question, au contraire, chaque échec parait conforter leurs auteurs à renchérir sur leur interventionnisme suicidaire.
Il ne leur vient jamais à l’idée de nous laisser libre, de nous faire confiance.
Ils étalonnent leurs convictions sur les abrutis qui ratent tout et nous imposent des solutions qui nous rendent tous abrutis, mais en règle.
La consolation serait qu’avant l’abruti était responsable de son état, plus maintenant.
C’est une maigre consolation qui porte en elle la destruction du lien social. Comment vivre en société si le marqueur hiérarchique est détraqué ? Si l’abruti obtient le même statut que l’intelligent ? Le fainéant que le travailleur ? Le véreux que l’honnête homme ? Le menteur que celui qui dit la vérité ? Le cancre que le bon élève ?
Je m’énerve, je m’énerve, je m’éloigne du mazout. Quelle fierté pour lui d’être valorisé à hauteur de l’essence. Comme quoi, il suffit d’attendre, tout peut arriver.
Le mazout coincé au fond de la colonne de raffinage, finit par rejoindre, dans nos cœurs et dans nos bourses, l’essence sortie en tête de colonne, puisque Bercy, lui pardonnant son côté « serial killer », nous l’a imposé.
Bien cordialement. H. Dumas