Dieu sait qu’ils se la pètent.

C’était quelques années, avant « la guerre des boutons », nous avions leur âge, dix à douze ans, une histoire circulait dans la cour de l’école :

« Le facteur passe devant Toto qui est assis sur le bord du trottoir où le caniveau retient une eau stagnante. Il a les mains dans la boue et à côté de lui des petits personnages qu’il façonne et fait sécher au soleil.

Le facteur salue Toto :

  • Bonjour Toto, que fais-tu ?
  • Tu le vois bien, je prends de la merde dans le caniveau et je fais un personnage.
  • Ah bon, et c’est qui ton personnage ?
  • Un facteur…

Malaise. Le facteur poursuit sa tournée, il arrive chez le boucher et offusqué lui raconte l’histoire.

Le boucher va voir Toto.

  • Bonjour Toto, que fais-tu ?
  • Tu le vois bien, je prends de la merde dans le caniveau et je fais un personnage.
  • Ah bon, et c’est qui ton personnage ?
  • Un boucher…

Le boucher n’en revient pas. En retournant à sa boucherie, il croise les gendarmes. Il leur dit :

  • Toto est vraiment un sale garnement.
  • Ah bon, pourquoi ?

Le boucher raconte ce que Toto lui a dit, ainsi qu’au facteur.

Les gendarmes s’arrêtent devant Toto et lui disent finement :

  • Salut Toto, que fais-tu ?
  • Vous le voyez bien, je prends de la merde dans le caniveau et je fais des personnages.
  • Ah bon et ce sont qui tes personnages, des gendarmes ?
  • Non, je n’ai pas assez de merde pour ça… »

La fin de l’histoire nous tirait des larmes de rire intarissables.

Toto était le précurseur de mai 1968, sans doute. Je ne sais pas si cette histoire est toujours en vigueur dans la cour des écoles, je ne sais même pas s’il s’y raconte toujours des histoires de Toto.

Pourtant il faudrait. Ce serait salutaire et bon signe. Il y aurait beaucoup à fabriquer sur le bord du trottoir, et probablement pas assez de matériaux.

D’abord des agents fiscaux, des DG de Bercy, de ces hommes ou femmes qui se la pètent dur et qui nous ont concocté 3 000 milliards de dettes. Que notre vie et celle de nos enfants ne suffiront pas à payer.

Et pour corser le tout et dissimuler leur forfaiture ils ont installé la terreur fiscale et poursuivent d’honnêtes entrepreneurs en les taxant de « fraudeurs fiscaux ».

Ils nous dressent les uns contre les autres, attisent nos jalousies naturelles, cherchent le chao, la guerre, espérant effacer leurs délits.

Ensuite des magistrats. En voilà qui se la pètent très dur.

Et pourtant, partout dans le monde les exemples fourmillent de leur coreligionnaires qui condamnent, enferment, tuent aux ordres de pouvoirs délirants.

Comment font-ils pour se croire différents, alors qu’ils sont les mêmes ? Sans aucune liberté, armes du pouvoir, exécutants serviles de celui-ci, qu’iIs partagent ou non ses idées politiques. Ils devraient se demander si le pouvoir peut ne pas être délirant, au moins.

L’idée de justice ne les effleure pas un seul instant. Ils ne vivent que pour l’ordre, et pourtant l’ordre est rarement juste.

L’air des salles d’audience est irrespirable, chargé de mensonge, d’hubris, d’hypocrisie et de pompe vulgaire. Ils y sont comme des poissons dans l’eau.

Il y aurait des exceptions ? Téléphonez-moi que je vienne voir, ça me redonnera le gout de vivre…

Des élus ?

Bien sûr que non. Ils sont eux-mêmes sur le bord du trottoir et fabriquent à longueur de temps des figurines de leurs collègues. Malheureusement cela ne fait rire personne.

Hélas point de mai 68 à l’horizon. L’époque n’est pas à la rigolade, à la quête de liberté, bien au contraire.

Aujourd’hui Toto serait envoyé en Sibérie.

Bien à vous. H. Dumas

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A propos Henri Dumas

Je suis né le 2 Août 1944. Autant dire que je ne suis pas un gamin, je ne suis porteur d'aucun conseil, d'aucune directive, votre vie vous appartient je ne me risquerai pas à en franchir le seuil. Par contre, à ceux qui pensent que l'expérience des ainés, donc leur vision de la vie et de son déroulement, peut être un apport, je garantis que ce qu'ils peuvent lire de ma plume est sincère, désintéressé, et porté par une expérience multiple à tous les niveaux de notre société. Amicalement à vous. H. Dumas

2 réflexions sur « Dieu sait qu’ils se la pètent. »

  1. Monsieur DUMAS, Puisque vous vous efforcez de sourire en ce dimanche (et comme vous avez bien raison de le faire), veuillez écouter une autre historiette pour cour de récréation, mais qui, contrairement à la vôtre, est beaucoup plus proche de l’esprit véritable de Toto…que de celui, détestable, de Mai 68 ! Lorsque j’étais enfant dans les années 80, il m’est arrivé plusieurs fois de participer à un jeu vraiment irrésistible : celui de la bataille de rimes. Il s’agissait, au cours d’une récréation, d’improviser entre camarades des vers burlesques à partir d’un thème donné ou d’une question posée. En clair, c’était un peu la version bouffonne de la dispute bouddhiste que les moines organisent entre eux chaque fois qu’ils prennent l’air et ne prient plus. Or, voici qu’un jour, au cours d’une de ces parties littéralement endiablées, me fut posée la question suivante : « Cher ami, que pensez-vous des soixante-huitards ? » Ne trouvant pas immédiatement de rime assez riche ou assez drôle, je me mis à murmurer d’agacement, en claquant du doigt : « Les soixante-huitards, les soixante-huitards… »Quand subitement vint l’illumination : « Ah, oui, je sais ! Reposez-moi la question qu’on rigole ensemble ! »Question réitérée : « Cher ami, que pensez-vous des soixante-huitards ? » Réponse tant attendue : « Eh bien, les soixante-huitards…ils ne feront pas de beaux vieillards ! » Et, depuis cette époque, le croirez-vous ? Chaque fois qu’il m’arrive de voir ou d’entendre DANY LE ROUGE, je me dis rétrospectivement… que l’Histoire m’a plutôt donné raison ! BIEN MALICIEUSEMENT !

    1. Je suis d’accord sur le résultat, pas sur l’interprétation.
      Mai 68 est une farce de potache qui se justifiait, j’en étais, à la base.
      Le drame ou la médiocrité que vous exposez à juste titre est lié à la récupération politique, pas à la force initiale.
      Récupération qui comme toutes les récupérations était viciée dès le départ.
      C’est le problème récurrent de la sincérité face à la duplicité. La sincérité perd toujours.
      Bien à vous.

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